Accès au registre des bénéficiaires effectifs : la France menacée par une procédure d’infraction ?

Christophe BARDY - GRACES community
20/9/2023
Propulsé par Virginie
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Nouveau rebondissement dans l’affaire de l’accès public au registre des bénéficiaires effectifs (RBE) en France : le célèbre cabinet d’avocat britannique Mishcon de Reya a récemment sollicité la Commission européenne afin de sanctionner la France en raison de son refus de clôturer l’accès du RBE au grand public. Ce même cabinet était déjà l’un des initiateurs de la procédure menant à la décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) d’invalider l’obligation européenne de transparence en matière de détention des personnes morales.

Le cabinet, par l’intermédiaire d’un de ses principaux associés, l’avocat Filippo Noseda, a adressé une lettre à Didier Reynders, commissaire européen à la justice, et à plusieurs représentants des institutions européennes, afin de demander à la Commission de prendre des mesures contre la France, qui a maintenu ouvert l’accès au RBE. Nous avons pu consulter cette lettre et échangé avec Filippo Noseda.


Une affaire en plusieurs épisodes


Pour rappel, l’accès au RBE a été bousculé à plusieurs reprises ces derniers mois.

Le premier acte de cette affaire remonte au 22 novembre 2023 : un arrêt de la CJUE invalide l’obligation européenne de publicité des informations sur les bénéficiaires effectifs des sociétés, au motif qu’elle constituerait une ingérence disproportionnée aux droits au respect de la vie privée et à la protection des données. Dans la foulée, plusieurs pays européens, dont l’Allemagne, ferment l’accès à leur registre. Cette situation est considérée par beaucoup comme une régression en matière de lutte contre le blanchiment et la corruption : plusieurs magistrats et associations, notamment Transparency International, ont à l’époque critiqué cet arrêt.


Acte deux quelques semaines plus tard : Bruno Le Maire publie un communiqué indiquant la décision du gouvernement français de maintenir l’accès du RBE au grand public. Depuis début janvier 2023, il était donc toujours possible de consulter le registre, malgré la décision de la Cour.

Fin mars, le dossier avance un peu sur le plan législatif : le Parlement Européen vient en effet d’adopter l’AML Package, qui comprend notamment un projet de mise à jour de la directive européenne antiblanchiment, afin de préciser et d’harmoniser les conditions d’accès au RBE.


À ce stade, nous pensions donc être dans l’attente d’informations complémentaires sur la position commune européenne à venir: un compromis cherchant à préserver la transparence permise par le RBE tout en garantissant la conformité des États-membres à l’arrêt de la CJUE.


C’était sans compter sur cette nouvelle offensive de Mishcon de Reya. Dans sa lettre, Filippo Noseda cite directement le communiqué de Bruno Le Maire et critique la position du ministre français, qualifiée « d’atteinte à l’État de droit » et de « menace pour le droit de l’UE ». Il demande à la Commission d’envoyer une mise en demeure – et à terme d’initier une procédure d’infraction – vis-à-vis de la France et de tous les pays européens qui ne respecteraient pas immédiatement la décision de la CJUE.


L’avocat britannique assume


Filippo Noseda n’en est pas à son coup d’essai : il avait déjà pris position contre l’accès public au RBE, et initié des démarches judiciaires contre d’autres réformes liées à la transparence dans le monde des affaires. S’agissant des RBE, il insiste sur l’atteinte aux droits fondamentaux que représenterait, selon-lui, un accès ouvert au grand public.


À date, nous ne savons pas s’il agit pour le compte d’un client ou de sa propre initiative – M. Noseda n’a pas souhaité donner de détails à ce sujet. Derrière sa démarche, l’avocat insiste toutefois sur ses combats en faveur de la protection des données personnelles, et fait le lien avec les récentes lignes directrices du Conseil de l’Europe en matière de protection des données dans le cadre des obligations LCB-FT. Il nous indique par ailleurs avoir été sollicité par le Conseil de l’Europe et par la Commission Européenne sur les liens la transparence des bénéficiaires effectifs et le respect de la vie privée.



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