La fonctionnaire, qui demandait entre 1000 et 4000 euros pour faciliter l’accès à un logement social, comparaît pendant deux semaines devant le tribunal.
Cadeaux, parfums et bakchichs contre logement social : une agent administrative à la ville de Marseille est jugée depuis lundi pour corruption, escroquerie et faux, aux côtés de treize complices et intermédiaires.
L'intervention de Rosina Livolsi, fonctionnaire du service logement de la mairie des 2e et 3e arrondissements, se monnayait de 1000 à 4000 euros, selon l'accusation. Toutefois, si l'enquête a recensé une quarantaine de plaignants, aucun ne s'est constitué partie civile.
«Elle m'a réclamé 2000 euros en novembre 2017. Elle m'a fait visiter deux appartements et je n'ai aucune nouvelle», avait attesté une mère de famille. Une autre avait rapporté : «Elle a dit qu'elle allait m'aider. Je lui ai amené un parfum à 60 euros, un gros bouquet de fleurs. Je venais depuis deux ans avec des cadeaux».
Entrée en 1998 à la mairie de Marseille, d'abord au cabinet du maire LR Jean-Claude Gaudin, Mme Livolsi avait fait le choix, en 2015, du service logement d'une mairie de secteur : «Car j'ai toujours eu beaucoup d'empathie pour les gens», a-t-elle expliqué.
En arrêt maladie en mars 2018, «parce que ça commençait à sentir mauvais», elle avait continué ce «troc» bakchich contre logement grâce à des complices qui, sous de fausses identités, se faisaient passer pour des agents des différents bailleurs sociaux.
La maire du secteur, Lisette Narducci, ex-socialiste passée au PRG et ralliée à Gaudin, avait dénoncé au parquet les agissements de cette collaboratrice en novembre 2018. La plainte évoquait des «anomalies», notamment des changements dans la liste des trois familles retenues par la mairie de secteur soumise à la commission d'attribution.
De nombreuses personnes s'étaient présentées à la mairie pour réclamer des nouvelles de leur demande de logement, évoquant les pots-de-vin versés. «J'ai participé à la campagne électorale et je n'ai rien eu», se plaignait ainsi un administré, dans une déclaration lue lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille.
Après avoir longtemps nié, Rosina Livolsi, âgée de 52 ans, avait reconnu les faits lors d'une seconde garde à vue, en 2022. Mais «je ne vais pas porter seule le chapeau», a-t-elle menacé à l'audience : «Des gens devraient être à côté de moi».
Devant l'Inspection générale des services, la fonctionnaire avait accusé la maire de secteur et sa directrice de cabinet de recevoir des enveloppes. À son domicile, les enquêteurs avaient découvert des attestations d'administrés affirmant avoir versé des pots-de-vin à une conseillère départementale, déléguée au logement.
Devant le tribunal, la prévenue a cependant reconnu qu'il s'agissait de faux : «J'étais dans une spirale catastrophique, je m'excuse», a-t-elle reconnu, admettant que ces accusations contre des élus, «ça n'a pas été intelligent».
L'avocat de la ville de Marseille, Me Benjamin Liautaud, a dit attendre le jugement pour que la municipalité statue disciplinairement sur cette collaboratrice, en arrêt maladie depuis novembre. Elle avait déjà été sanctionnée d'une exclusion temporaire de six mois pour deux condamnations, en 2020 et 2021, pour abus de faiblesse, contrefaçon de chèques, escroquerie et aide au séjour irrégulier par l'organisation d'un faux mariage. Les débats sont prévus pour deux semaines.
Par Le Figaro avec AFP
Publié le 20/02/2024
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