Les EMT dans la gouvernance des produits financiers

Christophe BARDY - GRACES community
22/2/2024
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« Autopsie des fichiers EMT dans la gouvernance des produits financiers »

Laurent AZEAU – Expert Data Recherche et Développement, Quantalys

Dalil ZOUIOUECHE – Consultant Chef de Projet, Freelance

 

                                                                        

Introduction

I.     Etat des lieux

A.    Les acteurs de la gouvernance produits

1.    Le producteur

2.    Le cas spécifique des sociétés de gestion soumises et non soumises à MiFiD

3.    Le distributeur

4.    La Compagnie d’assurance

5.    La plateforme intermédiaire

B.    L’exigence de détermination d’un marché cible formalisé au sein de la gouvernance produits

C.    Les points d’attention de l’AMF

D.    Les canaux d’échange d’informations dans le cadre de la gouvernance produits

II.    Le fonctionnement du fichier EMT

A.    Les modèles MiFiD EMT

B.    Les champs du fichier EMT et leur répartition

C.    L’implémentation du fichier EMT

1.    L’implémentation du fichier EMT sans le recours à une plateforme

2.    L’implémentation du fichier EMT avec le recours à une plateforme

III.       Les enjeux d’un fichier EMT incomplet ou incorrect

A.    Les champs fréquemment non renseignés par le producteur

B.    L’impact sur la définition ou la modification du marché cible

C.    La répartition des rôles et des responsabilités en cas de vente en marché cible négatif et hors marché cible

D.    Le cas des EMT des fonds H2O

Conclusion

Annexe



 

 

 

Introduction

 

« Il est souligné que le manque de diligences relatives à la gouvernance des instruments financiers peut compliquer la bonne commercialisation des instruments financiers »[1].

Par cette phrase ambivalente, l’AMF souligne, à titre liminaire, dans la synthèse de son contrôle SPOT les différents manquements actuels des acteurs de marché dans le dispositif attendu depuis trois ans par le régulateur dans la gouvernance des produits pour la commercialisation des instruments financiers.

La directive MiF II, entrée en vigueur depuis le 3 janvier 2018, a en effet introduit un nouveau cadre contraignant pour la conception et la distribution des instruments financiers pour assurer une meilleure protection des investisseurs sous l’approche « gouvernance des produits ».


La gouvernance des produits (ou « gouvernance produits ») est un terme normatif qui désigne la répartition des obligations et des responsabilités respectives entre le producteur et le distributeur d’un instrument financier (ou « produit »). La gouvernance produits repose concrètement sur un bloc d’obligations professionnelles qui définit les responsabilités de chaque acteur de la chaîne.


Principalement, ces obligations consistent à déterminer :

  • un marché cible qui permet d’identifier les investisseurs compatibles avec chaque produit commercialisé ;
  • une stratégie de distribution qui convienne au marché cible défini ;
  • un échange d’informations ;
  • une expertise du personnel impliqué ;
  • un réexamen régulier du dispositif ;
  • une gouvernance interne s’assurant de la conformité du dispositif ; et
  • la production de scénarios d’évolution des produits ainsi que la prise en compte des coûts et frais.


En France, le cadre de la gouvernance produits est principalement issu de quatre ensemble de texte : la Directive MiF II et sa directive déléguée, le Code monétaire et financier[2], le Règlement Général de l’AMF[3] et les orientations de l’ESMA n°35-43-620.


Géographiquement, les règles de la gouvernance des produits ne s’appliquent qu’aux établissements situés au sein de l’Union Européenne qui fournissent des services d’investissement au sein de cette dernière. De même, ces règles s’appliquent à tous types de clients[4] y compris lorsque le produit est exclusivement destiné à une clientèle professionnelle[5]


En effet, la gouvernance produits s’applique à tous types de clients indépendamment de leur classification bien que les établissements visés peuvent adapter les obligations en fonction des catégories de clients[6] et/ou à la nature des produits[7] concernés et/ou du service d’investissement fourni[8].

              

 Philosophiquement, l’architecture d’ensemble de la gouvernance des produits a été pensée par les législateurs et régulateurs européens comme une chaine complète et indivisible avec deux acteurs principaux : 

  • un producteur qui conçoit le produit, et 
  • un distributeur qui réalise le conseil et la distribution du produit auprès de son portefeuille de clients[9]


Ainsi, au départ, les auteurs du cadre réglementaire sont partis du postulat qu’en matière de gouvernance des produits, le producteur connait son produit et le distributeur connait son client. 


Schématiquement, cette chaine prendrait la forme ci-contre. 


Cette pyramide inversée, fournie par l’AMF, hiérarchise les obligations dans un ordre inversé. Incomplète à bien des égards, elle a, cependant, le mérite de la synthèse des principales exigences du producteur et du distributeur dans la chaine de commercialisation.


L’enjeu étant de proposer un dispositif adapté qui permet de fluidifier la communication, les échanges et les relations entre ces deux acteurs pour offrir une meilleure protection et un conseil adapté au client final. 

Les contraintes issues de la gouvernance des produits visent à encadrer les risques de mauvaise commercialisation des instruments financiers. Le but étant d’obtenir un meilleur ciblage des investisseurs compatibles avec chaque produit distribué par la définition de marchés cibles adaptés et de mieux informer les investisseurs sur la nature du produit.


À l’origine, le dispositif retenu pour fluidifier cette communication était un cadre contractuel énumérant toutes les informations sur les instruments financiers devant être échangées entre le producteur et le distributeur en vue de leur commercialisation[10]. Ce cadre, contraignant et peu adapté aux mutations de marché, obligeait producteur et distributeur à signer une convention de distribution d’instruments financiers listant ces derniers[11] à partir de l’ordonnance du 5 décembre 2008[12] transposant la directive MiF I.


Ainsi, il était devenu essentiel pour la Place de Place d’introduire un dispositif harmonisé plus souple et adapté à un environnement international où producteur et distributeur européen disposeraient des mêmes informations standardisées qui mettrait fin aux régimes nationaux des conventions de distribution dans son approche obligatoire, contraignante et exhaustive. Cette standardisation ne pouvait intervenir qu’avec le recours de la digitalisation d’informations.


Ainsi, avec l’entrée en vigueur de MiFiD II, cette standardisation attendue a pris la forme d’un nouveau fichier : The European MiFiD Template (ou « Fichier EMT »). Il s’agit d’un fichier d’échanges de données standardisées concernant la gouvernance d’un instrument financier destiné à être commercialisé. Ce format de standardisation présente des similitudes dans la logique réglementaire avec ce qui a été fait pour l'EPT (European PRIIPS Template) et le TPT (Tri-Partite Template pour Solvency 2).


On notera, ici, que si les règles de production, de distribution et d’échanges d’informations ont bien été définies et organisées par les textes européens, le fichier EMT en est sa principale traduction matérielle bien qu’il n’y ait fait aucunement mention.


Ce format, prenant la forme d’un fichier excel ou csv, s’intègre dans un nouveau dispositif organisé d’échanges d’information, toujours plus détaillé, où la gouvernance des

produits évolue sans cesse au gré des nouvelles exigences réglementaires.


Comprenant 66 champs lors de la création de la première version du fichier EMT (v.1), la dernière version (v.4.1) compte désormais 94 champs (104 pour les

produits UK) soit une inflation totale de champs de plus de 40% depuis la première version[13]


En effet, depuis la mise en œuvre du modèle EMT au début de l’année 2018, l’industrie financière a travaillé sur des changements de contenu visant à améliorer les capacités de transfert de données des instruments financiers. Ces changements étaient tantôt des correctifs d’interprétation tantôt des adaptations aux évolutions réglementaires.


Pour les régulés, la principale difficulté réside dans le fait que l’AMF se contente d’énumérer les règles et résultats souhaités, parfois au-delà de ce qui est prévu par les textes, sans donner une méthodologie claire pour y parvenir. 


Absente des orientations de l’ESMA et du dernier contrôle SPOT de l’AMF[14], le fichier EMT est pourtant au centre du dispositif de la gouvernance des produits[15]. Cette absence laisse raisonnablement à penser que la réglementation et le régulateur ne tiennent pas suffisamment compte de la digitalisation de l’émission et de la distribution des instruments financiers dans un contexte sanitaire renforçant la dématérialisation du conseil ainsi que le développement croissant des plateformes intermédiaires[16]


Indépendamment de la question de l’implémentation et des attendus du régulateur, le sujet nécessite d’avoir une connaissance métier avancée de la gouvernance de la donnée, de disposer de la ressource humaine et financière et/ou, à défaut, de passer par une plateforme de mutualisation des données. 


Face à une atomisation du marché de la production et de la distribution des produits financiers en Europe et de l’harmonisation de plus en plus verticale de la réglementation européenne, les acteurs de marché se sont dotés de nouveaux outils digitaux pour y faire face et être toujours plus compétitifs.


Sujet d’actualité aussi complexe que peu compris, le respect des règles de gouvernance produits est, depuis l’entrée en vigueur de MiFiD II, structurellement lié aux nouveaux

enjeux de la Data notamment via les fichiers EMT et EET (European ESG Template) dont la v.1 a récemment émergée[17]


Le standard de fichier EMT fait, dans ce contexte, figure de réponse concrète et évolutive où son contenu, son fonctionnement et ses versions sont adossés aux évolutions de marché et réglementaire toujours plus complexe et gourmand en ressources.


A l’heure du premier bilan de l’entrée en vigueur de MiFiD II et des orientations de l’ESMA sur la gouvernance produits, un état des lieux parait nécessaire (I) avant d’aborder le fonctionnement du fichier EMT (II) et les enjeux lorsque ce dernier est incomplet ou incorrect (III).

 

I.            Etat des lieux


L’état des lieux de la gouvernance produits amène à s’intéresser en premier lieu à ses acteurs principaux (A) puis, en second lieu, aux exigences réglementaires (B) rappelées par le régulateur français à l’occasion d’un contrôle SPOT (C) avant de lister les différents canaux d’échange d’informations possibles de la gouvernance produits (D).

 

A.           Les acteurs de la gouvernance produits

 

1.             Le producteur

Il est communément admis que le producteur est la société qui « fabrique » l’instrument financier. À cette définition générique, la réglementation MiFiD II précise qu’ont la qualité de producteur les établissements qui « produisent des instruments financiers, ce qui englobe la création, le développement, l'émission et/ou la conception d’instruments financiers »[18], y compris lorsque l’établissement conseille des entreprises émettrices sur le lancement de nouveaux produits[19].


La création ou la conception d’un instrument financier par un producteur est le processus qui détermine les caractéristiques principales du produit et qui a une influence économique directe ou indirecte sur le fonctionnement du produit, de son sous-jacent, de ses garanties ou encore des mécanismes de rentabilité ou de remboursement.


On parle usuellement de producteur au singulier pour désigner l’entité qui a conçu le produit mais il se peut qu’il y ait, en réalité, plusieurs entités qui ont contribué à ce processus et qui peuvent prétendre à la qualité de producteur au sens de MiFiD II. Ainsi, lorsque la production est le fait de plusieurs établissements qui ont participé à la détermination des caractéristiques du produit, les responsabilités des producteurs seront partagées entre ces différentes entités qui seront qualifiées de « coproducteurs ». Juridiquement, une convention écrite établira les responsabilités de chacune de ces entités et les modalités de coproduction du produit.


Dans le cadre de la gouvernance des produits, le producteur d’instrument financier définit les caractéristiques du produit, le marché cible, les canaux de distribution les plus appropriés et met à la disposition de tout distributeur tous les renseignements utiles sur les instruments financiers.


Il y a plusieurs types d’entités que l’on englobe dans la catégorie des producteurs mais il s’agit principalement d’établissements financiers et de sociétés de gestion dont il convient de distinguer le statut au regard de MiFiD II.


2.             Le cas spécifique des sociétés de gestion soumises et non soumises à MiFiD


Les règles du dispositif MiF II en matière de gouvernance des produits ne s’appliquent pas aux sociétés de gestion. Ce principe général signifie qu’une société de gestion qui est située en dehors de l’Union Européenne et qui ne fournit aucun service d’investissement n’a pas l’obligation de définir un marché cible et de fournir aux distributeurs tous les renseignements utiles sur les instruments financiers notamment via le recours aux fichiers EMT.


En effet, s’agissant de produits conçus par des entités qui ne sont pas soumises à MiF II, il appartient au distributeur d’obtenir suffisamment d’informations sur les instruments financiers proposés afin de disposer lui‐même de la matière lui permettant de remplir ses propres obligations, y compris l’obligation de déterminer lui‐même le marché cible. 


L’ESMA[20] a ainsi complété MiFiD II sur les exigences attendues en matière de gouvernance des produits lorsque l’instrument financier est produit par une société de gestion qui ne relève pas de MiF II en renforçant la protection de l’investisseur. Ce dernier doit bénéficier d’une protection et d’un service comparable à la situation inverse, c’est-à-dire dans le cas où la société de gestion serait soumise à MiF II. Ce sera au distributeur d’adapter le processus de collecte d’informations à cette situation. Cela signifie qu’il prendra toutes les mesures raisonnables pour s’assurer que les informations sur les produits obtenues du producteur respectent les normes de fiabilité permettant au distributeur de vérifier l’adéquation du marché cible du produit au profil de son client. Le plus souvent, ces informations sont contenues dans les kits de souscription contenant le DICI ou figurent en open data sur des plateformes de référencement.


En cas d’absence de données en libre accès jugées suffisantes, le distributeur doit se rapprocher du producteur pour l’obtention des informations manquantes avant de proposer ou de recommander l’instrument financier, sauf à se mettre en risque dans le cas contraire.


Néanmoins, ce principe de non soumission des règles de gouvernance des produits pour les sociétés de gestion connait une exception lorsque la société de gestion distribue elle-même les parts et actions des fonds qu’elle gère ou qu’elle fournit tout autre service d’investissement. Dans cette hypothèse, dès lors que la société de gestion rend un service d’investissement, en l’occurrence le conseil en investissement ou la gestion sous mandat notamment, elle est pleinement soumise aux règles MiF 2 s’y rattachant. La société doit, dans ce cas, se soumettre aux règles afférentes à la gouvernance des produits au titre du service d’investissement qu’elle commercialise[21]


Le dispositif réglementaire de MiFiD II inclut ici la société de gestion gérant un fonds et fournissant un service d’investissement à la fois comme un producteur et un distributeur : sont ainsi visées toutes les entités qui « décident de la gamme d’instruments financiers émis par elles-mêmes ou par d’autres […] et des services qu’elles comptent offrir ou recommander à leurs clients »[22].

 

3.             Le distributeur


Le distributeur est la société qui propose, recommande, commercialise (activement ou passivement), vend le produit et le service d’investissement à un client peu importe qu’il soit professionnel ou non professionnel. 


Le distributeur est donc celui qui va recommander ou commercialiser le produit. En principe, il ne participe pas à l’élaboration du produit.


Le distributeur peut prendre la forme d’un prestataire de services d’investissements (PSI), d’une société de gestion disposant de l’agrément pour fournir un service d’investissement (SGP), d’un conseiller en gestion de patrimoine disposant du statut de Conseiller en Investissements Financiers (CIF) ou encore d’un courtier en assurance (COA). Dans ce dernier cas, le courtier va distribuer les instruments financiers via les contrats multisupports d’assurance vie de ses clients assurés où les produits seront logés dans des Unités de Comptes (ci-après « UC »)[23].


Plus globalement, on considère qu’est distributeur toute entité qui a une relation directe avec le client final qui investit dans un produit financier. Il peut, cependant, y avoir plusieurs distributeurs dans une même chaine de distribution.


En matière de gouvernance des produits, les règles prévoient que le distributeur obtient les renseignements nécessaires du producteur, comprend les caractéristiques du produit, définit le marché cible et la stratégie de distribution permettant que le produit soit distribué auprès de la clientèle visée et communique périodiquement toute information pertinente au producteur sur la distribution du produit.


La réglementation attend, ainsi, du distributeur qu’il se dote d’un dispositif organisationnel approprié pour obtenir les renseignements utiles relatifs aux instruments financiers qu’il commercialise lui permettant (i) de comprendre les caractéristiques du produit et (ii) d’évaluer la compatibilité de chaque produit avec les besoins de ses clients notamment par rapport au marché cible défini. Les informations du produit sont obtenues auprès du producteur et sont ensuite confrontées à celles que le distributeur dispose sur ses propres clients pour analyser la correspondance avec le marché cible et la stratégie de distribution.

 

4.             La Compagnie d’assurance


La Compagnie d’assurance prend part à la chaine de commercialisation des instruments financiers via les supports d’investissement qu’elle créée : les contrats d’assurance-vie. 


Les contrats d’assurance-vie sont des enveloppes juridiques qui permettent de loger son épargne et de se constituer un capital avec un certain nombre d’avantage fiscaux dont il est possible de bénéficier en fonction de plusieurs critères. Les bénéficiaires de l’assurance-vie peuvent être l’épargnant et/ou ses proches selon les configurations du contrat.


Commercialisée majoritairement au travers de contrats « multi-supports », l’assurance-vie se compose de deux volets.


Le premier propose de loger les instruments financiers dans des unités de compte (« UC ») dans lesquels iront les produits financiers investis[24]. Une unité de compte désigne donc un support d’investissement sur un contrat d’assurance-vie et représentée par un ou des instrument(s) financier(s)[25]. Ainsi, le capital n’est pas libellé en euros mais en parts dont la valeur fluctue en fonction des marchés. Le montant et la valeur ne sont pas garantis par la Compagnie qui ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte.


Outre ces unités de compte, l’épargnant peut également choisir le fonds euros dans lequel les placements seront moins risqués en raison de la nature du produit (obligations, placement immobilier etc). Le fonds euros est à capital garanti contrairement à la plupart des UC. Depuis plusieurs années, le rendement de ce support est neutre voire négatif (frais, inflation etc), il est aujourd’hui considéré comme « un support refuge » en période de crise ou de forte volatilité.


La Compagnie d’assurance n’est pas soumise à MiFiD II et n’est donc pas un producteur au sens de ce texte. Dans le cadre de la commercialisation des instruments financiers dans les contrats d’assurance-vie, seule la Directive Distribution Assurance (DDA) s’applique à la Compagnie. Ce texte dispose de ses propres règles spécifiques à l’assurance-vie.


La présente étude ne traitera pas de la question spécifique de la gouvernance des produits d’assurance[26]

 

5.             La plateforme intermédiaire


Il y a plusieurs types d’entités que l’on nomme usuellement « plateforme » et qui interviennent à des degrés divers, directement ou indirectement, dans la chaine de commercialisation des instruments financiers du producteur jusqu’au client final.


Cependant, on peut génériquement définir une plateforme comme une société, régulée ou non, proposant des services technologiques comprenant un environnement partagé connectant les produits des producteurs avec les besoins des distributeurs et/ou des clients finaux.


Les plateformes ont, parfois, recours à des data providers, des agrégateurs de contenu et autres intégrateurs de données[27] lorsqu’elles ne disposent pas de toute la chaine technologique nécessaire en interne. 


C’est le cas des plateformes qui se focalisent sur le référencement et la commercialisation des produits à destination des professionnels de la distribution.


Les intégrateurs de données sont les intermédiaires qui s’immiscent entre la plateforme et les distributeurs ainsi que les clients finaux : ils intègrent les données EMT du producteur au sein de la plateforme mais également les données transactionnelles après que le client ait ouvert un compte puis souscrit au produit.


Les plateformes s’adaptent, dans l’ensemble, à toutes les spécificités des fichiers EMT. Elles réalisent le contrôle, l’analyse et la validation du format ainsi que la retranscription des informations contenues dans les fichiers EMT dans un format intuitivement plus lisible pour les distributeurs, que ce soit sur la plateforme et/ou dans les systèmes du distributeur. En d’autre termes, leur rôle est de collecter, standardiser et distribuer la donnée des instruments financiers en vue de leur commercialisation.


Les services fournis par les plateformes permettent de récupérer les fichiers EMT des producteurs, configurer les serveurs de ces derniers pour réaliser les envois automatiques de fichiers ainsi que leur mise à jour, personnaliser les données fournies et créer un environnement dédié pour les distributeurs. 


Des fonctionnalités additionnelles plus avancées sont fréquentes mais nécessitent généralement la souscription d’abonnement ou de licence complémentaire. 


Ainsi, certaines plateformes comme Quantalys propose à ses clients distributeurs deux formules : 

  • une première consistant à se rapprocher d’une plateforme de distribution pour mettre à disposition toute la donnée et la documentation mais sans réaliser le transactionnel, c’est-à-dire la fourniture d’un module gérant les flux financiers lors de la souscription et des rachats du client (directement ou indirectement via son conseiller). 
  • une seconde offre consistant à la fourniture d’une solution intégrée pour le distributeur avec un univers adapté au conseil mettant à disposition des fonctionnalités utiles pour la consolidation des portefeuilles des clients du distributeur (mise à disposition de questionnaire client, recueil d’information, comparateur de produits, simulateur etc.). Cette offre est disponible avec une licence professionnelle appelée « licence Pro+ », populaire auprès des distributeurs.


Les principaux concurrents de Quantalys sur ce marché des plateformes de centralisation de la donnée sont Euronext Fund 360, Morningstar ou encore FundLine.


Les avantages de recourir à ces plateformes pour les producteurs sont multiples. 


Premièrement, elles permettent de faciliter, standardiser et sécuriser les informations produits pour leur commercialisation. 


Deuxièmement, elles rendent les informations contenues dans les fichiers plus lisibles pour les distributeurs et investisseurs finaux. Enfin, la plupart des plateformes disposent de modules digitaux qui permettent d’intégrer des données de performance des produits ainsi que la documentation commerciale et réglementaire (prospectus, DICI, règlements etc) liée aux instruments financiers référencés.


Les avantages pour les distributeurs sont principalement liés au travail d’accompagnement et de facilitation à la bonne lecture des données produits fourni par les plateformes. 


De plus, la centralisation des informations des produits référencés constitue un gain de temps conséquent pour un distributeur lors des analyses d’adéquation puisque ce dernier dispose de toutes les données/documents produits au même endroit. De même, la majorité des plateformes intègrent une grande quantité de fonds dont les valorisations sont mises à jour automatiquement, avec leurs fiches complètes (historiques, indicateurs avancés, ratios etc). 


Aussi, certaines plateformes comme Quantalys proposent des modules de comparaison des produits, la possibilité d’intégrer des produits structurés dédiés ou encore de personnaliser les outils mis à disposition avec un bandeau aux couleurs du distributeur. Enfin, les plateformes offrent aux distributeurs un service d’assistance dans leur reporting des ventes hors marché cible qu’ils doivent remonter aux producteurs[28].


B.           L’exigence de détermination d’un marché cible formalisé au sein de la gouvernance produits


De prime abord, il est important de rappeler que le dispositif de gouvernance produits est un ensemble de règles qui s’appliquent à tous les produits vendus que ce soit sur le marché primaire et secondaire, indépendamment du type de produit ou de service fourni ainsi que des exigences applicables au point de vente du distributeur bien qu’un principe de proportionnalité s’applique[29].


Le producteur a trois obligations principales dans la gouvernance produits vis-à-vis du distributeur pour lesquelles ce dernier peut engager sa responsabilité. 


Premièrement, l’obligation de délivrer toute information ou document relatifs aux caractéristiques des produits, au processus d’approbation du produit ainsi qu’à la détermination du marché cible. 


Deuxièmement, l’obligation de communiquer au distributeur la liste des informations qui doivent lui être remontées.


Troisièmement, l’obligation de lui indiquer les canaux de distribution retenus et appropriés au regard du marché cible.


De son côté, le distributeur a également trois obligations principales. En effet, il doit déterminer le marché cible négatif, communiquer aux producteurs des informations sur les ventes et les réexamens effectués ainsi qu’indiquer au client si la vente intervient au sein du marché cible négatif ou si la vente est réalisée en dehors des marchés cibles négatifs et positifs.


Ainsi, parmi les obligations posées par le régime de gouvernance des instruments financiers se trouve l’obligation de déterminer un marché cible qui s’applique à la fois au distributeur et au producteur.


En effet, au sein de la Directive MiF II, il est clairement posé l’obligation de déterminer un marché cible pour chaque instrument financier qui doit faire l’objet d’un processus de validation par le producteur et le distributeur en ces termes : « Le processus de validation des produits détermine un marché cible défini de clients finaux à l’intérieur de la catégorie de clients concernée pour chaque instrument financier et permet de s’assurer que tous les risques pertinents pour ledit marché cible défini sont évalués et que la stratégie de distribution prévue convient bien au marché cible défini »[30].


Pour déterminer le marché cible de l’instrument financier, le producteur s’appuie sur les critères et catégories retenus au sein des orientations de l’ESMA[31].


L’article 16 de la Directive MiF II est complété par une obligation de réévaluation dans la durée du marché cible « afin d’évaluer au minimum si l’instrument financier continue de correspondre aux besoins du marché cible défini et si la stratégie de distribution prévue demeure appropriée »[32]. L’apparition du terme « approprié » ici a pu créer la confusion avec l’exécution d’une autre obligation réglementaire pour le distributeur qui figure à l’article L. 533-13 du Code monétaire et financier : le test de caractère approprié dont il résulte un devoir d’avertissement dans le cas où la connaissance et/ou l’expérience de l’investisseur serait insuffisante par rapport au produit/service fourni. 


D’emblée, il convient d’éclaircir le lecteur sur ce point en rappelant que les obligations de définition du marché cible intégrées dans la gouvernance des produits ne se substituent en aucun cas à la réalisation du test de caractère approprié (ou d’adéquation) pour le produit ou le service fourni au client final[33][34].


La directive déléguée MiFiD II détaille les exigences d’information de la gouvernance produits au sein des articles 9 et 10. 

Plus particulièrement, le paragraphe 9 de l’article 9 impose aux producteurs d’identifier de manière suffisamment précise le marché cible potentiel pour chaque instrument financier. On parle ici de marché cible positif théorique défini par le producteur. Ce dernier doit ainsi préciser le ou les types de clients dont les besoins, les caractéristiques et les objectifs sont compatibles avec cet instrument financier. Les paragraphes suivants égrènent les principales informations des instruments financiers devant être émises et fournies au distributeur telles que la structure tarifaire, les canaux de distribution appropriés ect. 


L’article 10 de la directive déléguée MiFiD II suit la même logique pour les distributeur en exigeant d’eux qu’ils se dotent de dispositif adapté leur permettant « d’obtenir suffisamment d’informations sur ces instruments financiers de la part de ces producteurs »[35]. L’alinéa suivant anticipe l’hypothèse où le producteur ne fournirait pas de marché cible théorique positif aux distributeurs : dans ce cas, les distributeurs « déterminent le marché cible de chaque instrument même si le producteur n’a pas défini de tel marché cible »[36].


Autrement dit, la définition d’un marché cible se construit en deux étapes. Dans un premier temps, le producteur défini un marché cible « potentiel » (ou « théorique ») puis, dans un second temps, il revient au distributeur de définir le marché cible « réel » en prenant en compte les limites du marché cible potentiel défini par le producteur[37].

 Focus sur les types de vente en fonction des marchés cibles

   

 Marché cible positif (ou « théorique »)

 Marché cible négatif

 Hors marché cible (ou « zone grise »)

 

 

Définition

Ce type de vente ne pose aucune difficulté dès lors que le produit a bien été distribué au sein du marché cible défini préalablement, c’est-à-dire que le produit est compatible avec le profil du client tel que défini au sein du marché cible par le producteur et/ou le distributeur. 


L’ESMA définit le marché cible négatif par opposition au marché cible positif. Le marché cible négatif théorique défini par le producteur se déduit par opposition à tous les investisseurs potentiels non inclus dans le marché cible positif. Il s’agit des ventes réalisés auprès d’investisseurs dont les produits sont incompatibles avec leurs besoins, caractéristiques et objectifs. 


Le distributeur devant affiner ce marché cible négatif théorique en définissant les groupes de clients auxquels le produit ne devrait pas être distribué au sein de sa clientèle[38].


Il s’agit des ventes auprès de groupes de clients n’appartenant ni au groupe défini dans le marché cible positif ni à celui défini dans le marché cible négatif. Par exemple, l’ESMA donne comme hypothèse la vente d’un produit sans conseil préalable[39] ou encore lorsque le distributeur ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour réaliser une évaluation approfondie afin de savoir si le client fait partie du marché cible.


  Contraintes de vente

 Aucune

 Oui

 Oui

  Reporting au producteur

 Non

 Oui

  Oui[40]

   

Source réglementaire

Articles 313-11, 313-13 et 313-18 RG AMF

Article 313-19 RG AMF ; Points 68 et suivants des orientations de l’ESMA n°35-43-620

Points 70 et suivants des orientations de l’ESMA n°35-43-620

  

C.           Les points d’attention de l’AMF


Les points d’attention du régulateur sont nombreux et d’importance inégale en fonction de la situation de l’acteur concerné. Néanmoins, dans son contrôle SPOT dont la synthèse a été publiée en octobre 2021, on constate que ces points d’attention se focalisent principalement sur les obligations incombant aux distributeurs[41].

L’analyse qui sera ici développée ne se concentrera donc que sur les points d’attention liées au cadre de la gouvernance produits dans lequel le distributeur pourra fournir son conseil auprès de clients non-professionnels.


Tout d’abord, l’AMF rappelle que la réglementation impose au distributeur de se doter de procédures adaptées[42] et d’un dispositif gouvernance produits opérationnel[43]


Cela signifie, premièrement, que le distributeur dispose d’un cadre procédural listant les éléments clés du dispositif de gouvernance des instruments financiers. 


Deuxièmement, le distributeur doit avoir mis en place une organisation lui permettant de s’acquitter des diligences lui incombant en matière de gouvernance produits notamment grâce à la réunion de comités composés d’intervenants clés au sein du dispositif. A cet égard, l’AMF exige que les prérogatives de ces comités doivent être clairement énoncées et formalisées. 


Dans sa synthèse, le régulateur considère qu’il y a deux types de comité :

  • un premier type de comité dédié à la commercialisation des nouveaux produits et traitant par la même occasion les marchés cibles à définir ainsi que la stratégie de distribution à adopter ; et
  • un second type de comité davantage orienté sur la bonne gestion des dispositifs en place et traitant à la fois l’efficacité des processus ainsi que la révision des marchés cibles définis selon les remontées d’informations et anomalies constatées.


Par ailleurs, le régulateur relève que lorsqu’un distributeur appartient à un groupe et que le dispositif de gouvernance produits est exclusivement définie et mise en œuvre par la société tête de groupe, les insuffisances se répercutent sur l’ensemble de ses filiales qui doivent davantage s’impliquer dans le dispositif groupe et son contrôle effectif[44]. Il est, ici, recommandé aux distributeurs filiales au sein d’un groupe comme aux distributeurs indépendants, d’établir un rapport annuel faisant état des éventuelles anomalies et des plans de remédiations associés ou encore de participer à la rédaction et à la validation des procédures sur le sujet[45].


Ensuite, concernant les échanges entre le producteur et le distributeur pour la commercialisation des produits, l’AMF a eu l’occasion de rappeler, notamment dans son contrôle SPOT d’octobre 2021[46], que ces échanges doivent être formalisés et encadrés au sein de procédures internes à leurs entités respectives en sus de la mise en place de conventions. Ces échanges portent à la fois sur les produits eux-mêmes, le marché cible, les ventes à reporter[47] ou encore les stratégies de distribution.


Lorsque le producteur appartient au même groupe que le distributeur, on observe que les informations sont transmises dans un cadre prédéfini et formalisé. Cependant, dans l’hypothèse inverse, l’AMF constate un manque de formalisme dans ces échanges ne permettant pas d’assurer la traçabilité de la transmission des informations produits.


Enfin, point d’attention le plus pertinent pour notre démonstration qui mérite d’être approfondie : la question de la définition du marché cible et sa correspondance avec le portefeuille clients du distributeur. À ce sujet, il convient de distinguer les deux problématiques majeures identifiées par le régulateur.


Premièrement, la problématique de la définition du marché cible par le distributeur[48] notamment lorsque le distributeur appartient à un groupe et que l’entité mère s’arroge toutes les prérogatives sur cette question sans que les filiales puissent s’en écarter en fonction des spécificités de leurs clients. Il en est de même pour les stratégies de distribution[49]


L’AMF se réfère, en l’occurrence, aux orientations de l’ESMA qui prévoient que ces deux sujets doivent toujours être examinés avec un « œil critique » de la part de chaque entité de distribution quand bien même elle appartiendrait à un groupe qui centraliserait tout mais en tenant compte des informations communiquées par le producteur[50].


Deuxièmement, la problématique de la mise en place opérationnelle des marchés cibles avec la création d’une « matrice » informatique où serait renseignée dans une fiche ou directement dans les systèmes d’information (SI) internes des distributeurs les critères de gouvernance produits. 


Cette « matrice », enregistrée dans un fichier indépendant ou dans le SI du distributeur, permet de s’assurer de la correspondance matérielle des critères de gouvernance avec les besoins et le profil du client selon la méthode du scoring[51]. À l’issue de ce processus de scoring, trois résultats sont possibles : soit la vente est réalisée dans le marché cible positif, soit en marché cible négatif, soit en dehors du marché cible auquel cas elle devra faire l’objet d’un reporting au producteur[52]


À la question de savoir si le distributeur doit reprendre en l’état les critères définis par le producteur dans cette matrice ou son SI sans pouvoir en dévier, l’AMF tranche cette question d’importance au détour d’un paragraphe : « il revient au distributeur de traduire, selon sa nomenclature interne d’évaluation du profil du client au regard des règles d’adéquation ou de caractère approprié, les critères qui lui ont été communiqués par le producteur (…). Au-delà de cette ‘traduction’, le distributeur doit également adapter le marché cible producteur selon les spécificités propres de sa clientèle afin de définir le ‘marché cible réel’, sans toutefois dévier des décisions fondamentales adoptées par le producteur »[53].


Autrement dit, lorsque le distributeur reçoit le fichier EMT contenant notamment les critères de marché cible défini par le producteur, il ne peut se contenter de reprendre le fichier sans analyser la pertinence du marché cible et, éventuellement, procéder à sa propre définition du marché cible quand bien même le producteur appartiendrait au même groupe que le distributeur[54]. Si le marché cible défini par le producteur n’a pas besoin d’être modifié, le distributeur peut utiliser celui-ci tel quel[55].


D.           Les canaux d’échange d’informations dans le cadre de la gouvernance produits


Grand oubli des rédacteurs de la réglementation MiFiD II, les modalités concrètes d’échange d’informations sur la gouvernance produits constituent, néanmoins, une question fondamentale pour les acteurs concernés.


Dans le prolongement des canaux d’échange déjà existant sous MiF I, les acteurs ont continué à s’appuyer sur ceux convenus auparavant dans les conventions de distribution. Il s’agit principalement d’échange d’emails, d’une mise à disposition de données téléchargeables sur le site internet du producteur, du recours à des fournisseurs de données ou, plus récemment, l’utilisation d’un système de partage d’échanges d’informations standardisées constitués des fichiers EMT remplis par le producteur et qu’il met à disposition auprès de son réseau de distributeurs ou sur des plateformes de collecte d’informations[56].


C’est ce dernier format qui semble l’emporter dans la grande majorité des échanges d’informations.


En effet, le fichier EMT est ici une réponse technique standardisée au besoin et à l’obligation qui pèse sur le distributeur de sélectionner les produits financiers les plus adaptés aux profils de ses clients grâce aux informations figurant au sein du fichier. 


Grâce au fichier EMT qui comprend l’essentiel des informations du produit, le distributeur, en se procurant ce dernier, est en mesure de justifier la sélection de ce produit auprès de son client puisqu’il pourra comparer les caractéristiques du produit avec le souhait d’investissement de celui-ci.


Le fichier EMT peut être assimilé dans cette analyse à une « étiquette produit détaillée » ou à une « fiche technique » comprenant à la fois les caractéristiques du produit et la clientèle cible grâce au marché cible positif déterminé par le producteur et éventuellement complété par le distributeur[57]


De ce marché positif, le distributeur pourra en déduire le marché cible négatif[58].


De même, le fichier EMT répond concrètement à l’obligation de mise à disposition des informations nécessaires à la distribution pesant sur le producteur qui figure au sein de la Directive MiF II : le producteur « qui conçoit des instruments financiers met à disposition de tout distributeur tous les renseignements utiles sur l’instrument financier et sur le processus de validation du produit, y compris le marché cible défini de l’instrument financier »[59].


Dans le cas où producteur et distributeur consentent à ce que cette mise à disposition s’opère par la transmission du fichier EMT, le recours à une plateforme intermédiaire est souvent indispensable pour le distributeur qui souhaite récupérer une information synthétisée et facilement lisible pour réaliser son conseil. Toutefois, l’intervention d’une plateforme implique le respect de plusieurs obligations qui s’imposent à elle et qui figurent au dernier paragraphe de l’article 10 de la directive déléguée MiFiD II qui assimile la plateforme à une « entreprise d’investissement intermédiaire ». 


Le paragraphe 10 de l’article 10 de la directive déléguée MiFiD II liste trois obligations principales incombant aux plateformes intermédiaires : ces dernières « a) veillent à ce que les informations pertinentes sur le produit soient transmises du producteur au distributeur final de la chaîne ; b) permettent au producteur qui demande des renseignements sur les ventes d’un produit en vue d’assurer le respect de ses propres obligations en matière de gouvernance des produits d’obtenir ces informations ; c) respectent, en relation avec les services qu’elles fournissent, les obligations de gouvernance des produits applicables aux producteurs ».


Cependant, il convient de souligner que le format du fichier EMT ne constitue pas une obligation réglementaire et n’est pas mentionnée par le dispositif MiFiD ou dans l’une de ses annexes. Ainsi, il est toujours possible et concevable que la transmission des informations du produit du producteur au distributeur se matérialise par d’autres canaux d’échanges et sous un autre format.

 

II.         Le fonctionnement du fichier EMT

 

Pour comprendre le fonctionnement et la composition d’un fichier EMT, il convient de revenir à sa genèse historique qui démarre avec l’émission de modèles qui ont fait l’objet de discussions de Places (A). Ces modèles ont évolué dans le temps au fur et à mesure que des nouvelles versions ont intégré des nouveaux champs et en ont supprimé d’autres (B). Enfin, sujet technique mais néanmoins majeur dans l’environnement de l’EMT, celui de son implémentation et de son intégration chez le distributeur qui a parfois recours à des plateformes pour lui faciliter ce travail (C).

 

A.           Les modèles MiFiD EMT


La première version modèle (ou template) v.1 du fichier EMT a été finalisée en aout 2017 par le European Working Group (EWG). Les sections et les champs de ce fichier reprennent à la fois les exigences du dispositif MiF II et les orientations de l’ESMA. Le template standardise toutes les informations sur la gouvernance produits énumérées par la réglementation.


Ce modèle ainsi que tous les templates ultérieurs sont disponibles sur la plateforme FinDatEx[60] qui met à disposition gratuitement en open data les modèles de fichier EMT par version. Ces derniers détaillent les champs à remplir, section par section, en fonction des évolutions réglementaires. 


La plateforme FinDatEx est une structure commune créée par des représentants du secteur européen des services financiers[61] et a pour ambition de coordonner, d’organiser et de mener des travaux d’harmonisation pour faciliter l’échange de données entre les acteurs de Places européennes.


Il convient de rappeler que ces templates sont libres de tout droit de propriété intellectuelle et ne sont mis à disposition qu’à titre informatif. Ainsi, il n’existe pas de formalisme obligatoire pour se conformer aux exigences de gouvernance produits.


Malgré les efforts de concertation entrepris pour la création de la première v.1, celle-ci a rapidement fait l’objet de correction et une nouvelle v.1 a été émise le 1er février 2019 après avoir constaté de nombreuses asymétries d’interprétation sur les champs à remplir. Ainsi, il est rapidement apparu des divergences de remplissage de la v.1 des fichiers EMT entre producteurs en fonction des places financières dans lesquelles où ils se situaient.


*Exemple d’un fichier EMT v.1 disponible sur le site internet d’Aviva


Les premières modifications de la v.1 étaient donc principalement motivées, au départ, par une volonté d’harmonisation d’interprétation des champs à remplir au sein des Etats membres concernés. Par la suite, à mesure que les attentes réglementaires et les pratiques de l’industrie financière ont évolué, il était devenu indispensable de faire évoluer les versions de fichier EMT pour intégrer ces dernières. 


C’est le cas pour les versions ultérieures v2 à v4.1. Face au succès de la v.1 du template EMT, ce format s’est rapidement imposé et une version v.2 a été publiée en octobre 2018. Cependant, cette version était uniquement destinée aux produits structurés, excluant les fonds. 


La version v.3 a été publiée le 10 décembre 2019 et comprend 94 champs soit dix de plus que la version précédente. Cette version a fait l’objet de quelques ajustements intégrés dans une nouvelle v.3 émise le 2 décembre 2021. 


Cette v.3 concerne à la fois les produits structurés et les fonds puisqu’elle a ajouté des champs pour ces derniers. Par ailleurs, la v.3 réorganise les sections de champs pour les rendre plus lisibles et cohérentes. Les champs sont, en effet, renommés et sont regroupés de manière plus logique.

* Données : FinDataEx, 2022


Une version dite « intermédiaire » v.3.1 a été publiée le 12 février 2021 par FinDatEx dont l’objectif principal était de répondre aux nouvelles

exigences réglementaires issues des normes ESG/SFDR. 


Compte tenu des dates d’entrée en vigueur des actes délégués de SFDR de niveau 1 et de SFDR RTS[62], la version v.3.1 est venue compléter, dans l’urgence, la version précédente

sans qu’il ne soit possible de les fusionner. 


Cette version intermédiaire coexistait donc avec la v.3. Les principales modifications portent, logiquement, sur les champs de données relatifs aux critères environnementaux pour faire ressortir l’éligibilité du produit à la finance durable[63].

 

Plus récemment, une nouvelle version v.4 a été publiée le 14 mars 2022.


Cette version reprend l’ensemble des champs déjà présents dans la v.3.1 mais qui, pour la première fois, suppriment des champs. Cette version fait ainsi passer le nombre de champs de 98 à 94 en enlevant principalement les champs de données spécifiques à chaque pays et liés aux critères extra-financiers (ESG) mais en renforçant le champ n°56 relatif à l’éligibilité aux critères environnementaux.


La v.4 fait suite à l’introduction de la réglementation European ESG Template (EET) qui créée officiellement un nouveau modèle d’échange de données standardisées dans l’espace économique européen (EEE) pour les produits remplissant certains critères environnementaux. La v.1 de l’EET publiée en mars 2022, au même moment que la v.4 de l’EMT, comprend 580 champs. On notera donc que la suppression des 4 champs au sein de la v.4 s’accompagne corrélativement de la création de 580 champs dans un autre modèle de fichier. 


La v.4 de l’EMT a remplacé, à partir du 1er aout 2022, les versions v.3 et v.3.1. Cette bascule vers la v.4 devait intervenir au même moment que l’entrée en vigueur de la v.1 de l’EET et à la lumière des révisions réglementaires MiFiD II[64] et IDD[65]. Bien que cette date cible paraissait, à priori, un peu ambitieuse compte tenu de la masse de données à rassembler, la bascule vers la v.4 de l’EMT a bien eu lieu à la date initialement prévue[66]


Une version v.4.1 a été publiée le 11 avril 2023 et est venue de substituer à la v.4.1. Sans nouveauté majeure, cette v.4.1 intègre, cependant, 10 nouveaux champs optionnels recquis pour la commercialisation des produits au Royaume-Uni. Cet ajout fait suite à un besoin réglementaire exprimé par les acteurs et le régulateur britannique pour prendre en compte leur spécificité (méthode de calcul des couts de transaction ex ante et ex post etc). 


Concernant, la v.1 de l’EET et ses 580 champs, la solution finalement retenue est celle d’une application dite intermédiaire (ou « light ») où une grande majorité des champs ne sont pas obligatoirement à remplir. Il convient de noter, cependant, que plusieurs nouvelles versions de l’EET ont été produites depuis :v1.1 (24 octobre 2022), v.1.1.1 (18 janvier 2023) et v.1.1.2 (20 décembre 2023). 


A compter du 30 juin 2023, tous les champs ont dû être dument complétés par les producteurs pour leurs produits éligibles. Le premier exercice de référence EET est donc celui de 2022 pour les reporting attendus en 2023. 


Au 31 décembre 2022, Quantalys a reçu plus de 70.000 produits couverts par la v.1 EET et 114.000 pour la v.1.1.1 au 31 décembre 2023, démontrant que l’industrie s’est vite adaptée à ce nouveau format pour rendre éligible leurs produits aux exigences ESG.


Précisons que les migrations de version précédentes ont été réalisées sans qu’une date de conversion unique ait été déterminée de sorte que les producteurs ont pu continuer à utiliser des versions précédentes (sur demande). Toutefois, la plateforme FinDatEx recommande aux producteurs de données de passer progressivement aux versions les plus récentes à chaque émission d’un nouveau modèle avec une date butoir indicative.


Rappelons également que ces modifications de version s’appliquent à tous les pays de l’EEE y compris à la Suisse et au Royaume-Uni postérieurement au Brexit dès lors que les producteurs locaux opèrent dans l’EEE ou qu’ils créent des produits en Europe pour servir leur clientèle située dans l’EEE.

*Données Quantalys au 31/12/2023                          


B.           Les champs du fichier EMT et leur répartition

 

Tout d’abord, il convient de rappeler quelques éléments basiques sur la constitution d’un fichier EMT. 


Premièrement, le fichier EMT est un fichier informatique prenant la forme d’un fichier excel ou csv. 


Deuxièmement, il faut que chaque instrument financier ait sa propre ligne de données au sein du fichier EMT. Autrement dit, le fichier EMT peut contenir plusieurs instruments financiers qui sont listés par ligne. 


Troisièmement, le contenu du fichier EMT est rédigé en langue anglaise. 


Quatrièmement, chaque version de fichier EMT est organisée de la même manière : il se compose en champs de section. Dans la v.3.1 et v.4, il y a quatre sections correspondant à quatre thématiques différentes : les informations sur le fichier EMT lui-même, les informations générales sur l’instrument financier, le marché cible, les coûts/frais et, pour la v.3.1 des informations additionnelles sur le produit. Chaque champ est numéroté et le premier commence par 00001. 

 

Il y a quatre types de champs à remplir: « Mandatory » (obligatoire), « Optional » (optionnelle), « Conditional » (conditionnelle) et « Indicative » (indicatif). Seuls les champs Mandatory doivent impérativement être remplis pour satisfaire aux obligations réglementaires. Les champs Optional et Indicative sont facultatifs. 


En revanche, le champ Conditional dépend de l’instrument financier et de la réponse à un ou plusieurs autre(s) champ(s). Certains champs sont, en effet, dédiés à la classe d’actif à laquelle appartient l’instrument financier selon qu’il s’agit d’un fonds d’investissement ou d’un produit structuré.


Un grand nombre de champs du fichier EMT sont des questions à choix multiples avec deux voire trois

réponses attendues : Y (pour Yes), N (pour No) et Neutral (pour neutre).

Les autres champs de réponse sont essentiellement des données chiffrées (frais, coûts, profil de risque etc) et des chaines de caractères sur les données nominatives du produit. 

À titre d’exemple, si l’on prend le modèle de fichier EMT sous la version v.4 pour les champs concernant les fonds d’investissement (OPC), les champs sont répartis de 

* Données : FinDataEx, 2022.

** Ces données ne concernent que les champs applicables aux fonds (OPC). Pour les produits structurés, le nombre de champs obligatoires est de 37 et de 47 pour les champs non obligatoires.   

* Données : FinDataEx


En analysant dans le détail le tableau ci-dessus, on relève que les champs les plus nombreux du fichier se concentrent sur les informations générales sur l’instrument financier et les coûts/frais du produit. Le graphique ci-contre confirme cette analyse sur la répartition des champs par thématique dans un fichier EMT v.4 concernant un fonds d’investissement.

Une description détaillée des champs obligatoires du fichier EMT v.4 est annexée au présent document[67].


Enfin, force est de constater que les champs prévus dans le format EMT ne peuvent pas couvrir chaque type de caractéristique de produit existant dans l’EEE. Ainsi, il est important de garder à l’esprit pour les acteurs de la gouvernance produits que l’EMT ne doit être considéré que comme un simple mécanisme de communication et de filtrage utile. Cependant, il nécessite d’être complété par d’autres supports d’information.


Aussi, les distributeurs doivent toujours vérifier les informations contenues dans un fichier EMT récupéré d’un producteur. Le fichier peut contenir des erreurs et des omissions d’informations. Cette vérification peut se faire par le biais de la documentation du produit.


Une fois ce travail de vérification effectué sur les informations renseignées dans les champs du fichier EMT, le distributeur devra s’assurer que le produit correspond aux attentes de son client notamment via la méthode du scoring[68] entre le produit et le client.

 

C.           L’implémentation du fichier EMT

 

Préalablement à l’implémentation et l’intégration du fichier coté distributeur, les modes de collecte de l’EMT doivent être abordés. L’émetteur du fichier EMT étant le producteur, se pose les questions de savoir par qui et comment sont récupérés les fichiers EMT des produits de ce dernier. 


Les modes de collecte des fichiers EMT auprès des producteurs sont multiples : emails, site internet du producteur, envoi de flux automatisés (appel d’API), serveur dédié etc. La collecte et l’implémentation peuvent se faire dans une relation directe entre le producteur et le distributeur (i) ou indirecte via le recours à une plateforme (ii).

 

1.             L’implémentation du fichier EMT sans le recours à une plateforme


Sans le recours à une plateforme, le producteur met à disposition du producteur le fichier selon deux hypothèses :

  • Soit produit par produit, c’est-à-dire fichier EMT par fichier EMT. Ici, il y a un seul produit dans le fichier EMT. Ce mode de collecte et d’implémentation est fréquent lorsque le distributeur souhaite conseiller un seul produit en particulier pour son client ou à la demande de ce dernier. Dans ce cas, il n’a aucun intérêt à demander le fichier EMT du producteur avec tous les produits de sa gamme
  • Soit un fichier avec tous les produits émis par le producteur. Ici, le producteur met à disposition du distributeur, dans un seul fichier EMT, tous les produits de sa gamme d’actifs.


Une fois le fichier EMT brut récupéré, le distributeur devra « nettoyer » la donnée de manière à la rendre plus lisible en sélectionnant les informations pertinentes pour son travail d’adéquation.


Il arrive que le distributeur possède son propre module digital interne où il implémente le ficher EMT dans ses systèmes de référencement produits pour faciliter la réalisation du scoring entre le produit et le profil de son client.

 

2.             L’implémentation du fichier EMT avec le recours à une plateforme


Si l’on concentre l’analyse tant sur la plateforme de commercialisation que sur les autres plateformes (agrégateur et intégrateur de données financières), on observe qu’outre l’implémentation classique ci-dessus énumérée, la valeur ajoutée de la plateforme se situe essentiellement au niveau du traitement des données du fichier EMT.


En effet, une fois collecté, le fichier EMT brut va faire l’objet d’un traitement technologique à l’issue duquel deux types de versions seront émises par les plateformes :

  • Une version dite « nettoyée » : une plateforme telle que Quantalys détient dans ses bases de données les valeurs attendues au sein des fichiers EMT collectés, on parle ici de « domaines de valeur » dès lors que la valeur doit respecter une ou plusieurs conventions de normes. À la réception du fichier EMT, la plateforme va comparer les valeurs reçues par rapport aux domaines de valeur et va réaliser un travail d’interprétation des données de l’EMT. Si les valeurs reçues ne respectent pas les domaines de valeur, Quantalys convertit et adapte la donnée reçue vers la donnée attendue. 

 

À titre d’exemple, sur le champ

obligatoire n°55 de la version v.4 du fichier EMT intitulé « 05080_Minimum_Recommanded_Holding_Period » (période minimale de détention recommandée), les valeurs attendues sont, alternativement, soit « V », « S », « M », « L » ou « H » qui signifie respectivement « Very Short Term » (<1an), « Short Term » (>=1an), « Medium Term » (>=3ans), « Long Term » (>5ans) et « Hold To Maturity » (à conserver jusqu’à l’échéance). Il arrive fréquemment que ce champ soit renseigné de manière erronée par la valeur « LT ». Dans ce cas, la plateforme va interpréter cette valeur incorrecte et la convertir en « L » pour « Long Term ». Il arrive également que certains champs ne soient pas erronés mais tout simplement non renseignés auxquels cas la plateforme réalise un travail d’analyse et de conversion analogue[69].

   

Une version dite « interprétée ». Dans cette version, certains champs sont interprétés par la plateforme et sont reformatés dans une interface dédiée de manière à rendre les données pertinentes de l’EMT plus facilement lisibles pour le distributeur. La plateforme ne fournit ce travail que pour certains champs (caractéristiques principales du produit, éligibilité ESG, marché cible, niveau de risque, frais/coût) car il n’y a pas d’intérêt à le fournir pour tous les champs de l’EMT. 


Ainsi, ces données sont présentées d’une manière simplifiée et adaptée à l’exercice du conseil pour le distributeur mais également pour l’investisseur final (voir ci-contre)[70]

 

On observe que les plateformes collectent majoritairement les fichiers EMT auprès des producteurs par la mise en place d’API où les flux d’envois sont automatisés. 

 

Le principal avantage est que le fichier EMT mis à la disposition par le producteur est régulièrement mis à jour. Un module intégré coté plateforme permet de détecter les changements apportés au fichier sans que la dernière version n’écrase la précédente. En effet, une plateforme telle que Quantalys archive systématiquement les versions précédentes dans ses bases de données pour historiser les versions.

Les producteurs sont enclins à collaborer avec ce type de plateformes compte tenu de l’impact et de la volumétrie potentielle pour la distribution. Par cette relation, les plateformes sont en contact avec la majorité des producteurs dans l’EEE.


III.      Les enjeux d’un fichier EMT incomplet ou incorrect

 

Un fichier EMT incomplet ou incorrect commence par des champs non renseignés ou incorrectement renseignés par le producteur (A). Ceci a un impact certain sur la définition du marché cible du produit (B) pouvant aller jusqu’à engendrer des ventes en marché cible négatif voire hors marché cible posant des questions sur la répartition des responsabilités et des rôles (C). A titre d’illustration, nous aborderons le cas symptomatique des fonds H20 (D).

 

A.           Les champs fréquemment non renseignés par le producteur


Selon les données statistiques fournies par Quantalys, sur un échantillon de plus 80.000 EMT reçus en version 4, les champs obligatoires (Mandatory) les plus fréquemment non renseignés sont les suivants :

*Source : Quantalys, données au 31/12/2022.


Une lecture rapide de ce classement permet d’observer, à priori, que les champs les plus souvent non remplis sont ceux qui, paradoxalement, concernent les coûts et frais. Cependant, une analyse plus approfondie de ce classement conduit à nuancer la portée de ce constat. 


Tout d’abord, le champ le plus fréquemment non renseigné : « 08080_Financial_Instrument_Incidental_Costs_Ex_Post » est le champ qui concerne la commission de surperformance du produit. Bien que ce champ soit catégorisé en champ obligatoire, c’est-à-dire nécessitant qu’une information soit renseignée, certains producteurs émettent le fichier EMT en laissant ce champ vide dès lors que le produit ne prévoit pas de telle commission. Or, en tant que champ obligatoire, quand bien même le produit ne prévoirait pas une telle commission, ce champ devrait être à zéro (0). 


Ainsi, on comprend que si les champs des frais/coûts sont indûment laissés vides par les producteurs, la raison principale se trouve dans le paramétrage de leur système d’émission d’EMT qui consiste à n’attribuer aucune valeur aux champs à zéro (0). Dans ce cas précis, les plateformes et les distributeurs devront donc interpréter et convertir ce champ vide ou affiché « NULL » en valeur zéro (0).


Par ailleurs, pour la version 3.1, en examinant les statistiques par famille de champs (section) dans les fichiers EMT, on s’aperçoit que, dans une moindre mesure, la seconde

famille de champs la moins remplie parmi les champs obligatoires (Mandatory) est celle du marché cible :

*Source : Quantalys, janvier 2022.


Le champ le moins renseigné parmi la famille de champs marché cible est le champ « 01020_Investor_Type_Professionnal » qui détermine le type d’investisseur professionnel cible. En l’espèce, il y a quatre types de données qui sont attendues pour ce champ :

  • « Y » pour « Yes », ce qui signifie que l’investisseur cible est à la fois un professionnel par nature (« Per Se ») et un investisseur professionnel sur option (« Elective Professional ») ;
  • « N » pour « No », ce qui signifie que l’investisseur cible n’est pas un investisseur professionnel ;
  • « P » pour « Professional Per Se », ce qui signifie que l’investisseur cible est exclusivement le professionnel par nature ;
  • « E » pour « Elective Professional », ce qui signifie que l’investisseur cible est exclusivement l’investisseur sur option.


En contextualisant ce champ au sein de sa section, on observe que le champ précédent est le champ « 01010_Investor_Type_Retail » et le champ suivant « 01030_Investor_Type_Eligible_Counterparty ». Par conséquent, si la donnée « Y » (pour « Yes ») est renseignée dans l’un de ces deux derniers champs, on peut logiquement supposer que la donnée qui aurait dû être remplie est « N » pour les autres champs[71] sauf dans le cas où le marché cible est plus large et s’adresse à toutes les catégories d’investisseur.


En toute hypothèse, dès lors qu’une valeur est attendue pour un champ, même si cette valeur est négative (« N ») et qu’elle se devine en fonction des autres champs contextuels remplis, ce champ doit obligatoirement être renseigné par le producteur. A défaut, le fichier EMT sera considéré comme incomplet voire incorrect nécessitant des interprétations de la part du distributeur. Or, ces interprétations peuvent être erronées lorsque le distributeur est amené à compenser le manque de diligence du producteur lors de l’élaboration de l’EMT y compris si cela résulte d’un mauvais paramétrage de valeur NULL, négative ou déductive.


On relève une logique analogue pour les champs obligatoires (Mandatory) suivants au sein de la v.4 :

*Source : Quantalys, au 31/12/2022.


Il en est de même lorsqu’on analyse les champs les plus fréquemment non remplis de la v.1 sur un échantillon d’environ 140.000 EMT :

*Source : Quantalys, au 31/12/2022.

 

Le champ « 05040_Return_Profile_Hedging » est le champ le plus fréquemment non repli car il a été interprété comme un champ ne concernant que les produits fournissant

une couverture. En effet, dans le Q&A du modèle EMT v.1 il est indiqué que ce champ est renseigné en « Yes » uniquement pour les instruments conçus pour répondre à des besoins de couverture par rapport à un indice sous-jacent, un actif ou un autre point de référence (incluant la plupart des instruments dérivés). 


De ce fait, plutôt que de mettre ce champ en « Neutral » ou « No » pour les fonds et les produits structurés qui sont peu susceptibles de fournir une telle couverture, les producteurs ont laissé ce champ obligatoire vide. 


Ce champ a, d’ailleurs, disparu des champs obligatoires dans les versions ultérieures.  


Il en est de même pour le champ « 03020_Limited_Capital_Loss ».


En revanche, lorsque le champ « 08070_Financial_Instrument_Transaction_costs_ex_post » n’est pas rempli, dont l’information attendue est une donnée chiffrée en pourcentage, le producteur considère que ce champ est nul au moment de l’émission de l’EMT. Ce champ concerne les frais produits tels que les frais d’acquisition du sous-jacent. Le plus souvent, si ce champ est vide ou à 0, ça s’explique à la fois par la complexité d’évaluer ces frais pour les fonds nouvellement créés et en raison du non-assujettissement de ces produits.


De façon générale, on note une nette diminution du nombre de champs obligatoires laissés vides entre la v.1 et la v.4 puisqu’à titre d’exemple, dans les bases Quantalys, la

plateforme est passée de 110.000 fichiers EMT reçus avec au moins un champ vide pour les v.1 à environ 20.000 fichiers pour les v.4 soit une baisse de 81%.

Cette chute met en lumière le travail significatif de consultation de Place sur la pertinence et le maintien de certains champs depuis la v.1 ainsi que le

meilleur paramétrage des systèmes d’émission d’EMT coté producteur. Ces derniers ont pris la mesure de l’impact négatif de ces EMT incomplets pour la

distribution de leurs produits notamment au regard du marché cible. 


B.           L’impact sur la définition ou la modification du marché cible

 

Comme vu précédemment, la réglementation MiF II définit les obligations de gouvernance produits notamment en matière de définition de marché cible dont l’objectif est que soit fabriqué et distribué le « bon » produit auprès de la « bonne catégorie » d’investisseurs. Autrement dit, l’objectif est d’éviter la distribution de produits inadéquats à certains clients.


A cet effet, les règles de gouvernance produits imposent au distributeur de se procurer toutes les informations sur le marché cible des instruments financiers qu’ils recommandent à ses clients auprès du producteur[72]. Le distributeur doit obligatoirement tenir compte du marché cible qui a été défini par le producteur[73] et avoir recueilli toutes les informations sur son client indispensable à la distribution.

En principe, ces informations figurent dans la section dédiée du fichier EMT où le producteur a renseigné le marché cible positif, c’est-à-dire la catégorie de personnes pouvant souscrire le produit. Par opposition, toutes les personnes n’entrant pas dans cette catégorie appartiennent, théoriquement, au marché cible négatif, c’est-à-dire les personnes à qui il convient de ne pas distribuer cet instrument financier du fait de leur non-correspondance au marché cible positif.


Cependant, la théorie est nuancée par la pratique dans plusieurs hypothèses.


Tout d’abord, le distributeur peut ne pas être d’accord avec la définition du marché cible effectuée par le producteur. Par conséquent, il devra le définir lui-même et conserver tous les éléments qui justifient l’analyse qui a mené à la détermination de son propre marché cible en s’affranchissant de celui du producteur. Cette possibilité lui est permise grâce à son « devoir critique » vis-à-vis du marché cible défini par le producteur[74]. Cependant, il appartiendra au distributeur d’en informer ce dernier[75].


Ensuite, dans le cas où le producteur ne renseigne que partiellement voire aucunement le marché cible positif au sein du fichier EMT ou de tout autre support, il se pose la question de savoir comment le distributeur peut y remédier. En l’occurrence, plusieurs situations sont possibles.


Premièrement, il y a le cas du fichier EMT mal rempli qui rend difficile voire impossible la définition d’un marché cible avec le risque que celui-ci soit volontairement ou involontairement trop large[76].


Deuxièmement, il y a le cas où le fichier EMT n’a pas du tout été rempli en ce qui concerne le marché cible.


En toute hypothèse, le distributeur peut, au préalable, se rapprocher du producteur pour lui demander des précisions sur le marché cible positif du produit. Cette possibilité apparait, cependant, bien théorique en fonction de l’identité du producteur dont les chances de réponse apparaissent bien faibles pour les producteurs ayant une dimension internationale ou une taille importante.

Néanmoins, en toute hypothèse, le distributeur peut demander au producteur de rééditer son fichier EMT dans l’hypothèse où des incohérences, incomplétudes ou erreurs sont constatées parmi lesquelles les champs obligatoires d’un marché cible non défini. Cette demande peut être à l’initiative de la plateforme intermédiaire.


Dans la première et deuxième situation, dès lors que les champs manquants concernent les informations sur le marché cible, le distributeur peut compenser les lacunes du producteur. Dans ce cas, le distributeur le définira lui-même de manière analogue à l’hypothèse où celui-ci serait en désaccord avec le marché cible défini par le producteur. Il convient de rappeler ici que lorsque le distributeur est également le producteur, une seule évaluation du marché cible est requise[77].


Pour définir ce marché cible, le distributeur déterminera classiquement à quel type de client s’adresse le produit, la connaissance et l’expérience nécessaire, la situation financière et la capacité à subir des pertes du client ainsi que sa tolérance au risque, ses objectifs et ses besoins. Le distributeur pourra s’appuyer sur les informations présentes dans la documentation commerciale et réglementaire du produit (ex. : DICI, DIC, prospectus etc) pour l’aider à déterminer le marché cible du produit.


Le marché cible fait également l’objet d’un réexamen régulier de la part du producteur qui s’appuie sur les remontées du distributeur. En effet, clarifions d’emblée un point important : le distributeur a l’obligation de procéder à un réexamen des produits en prenant en compte tous les éléments susceptibles d’avoir une incidence sensible sur le risque de marché pour le marché cible. La définition de ce marché cible et la procédure de gouvernance produits seront modifiées s’il s’avère que le marché cible initial ait été mal défini ou que le produit ne correspond plus au marché cible[78]

 

C.           La répartition des rôles et des responsabilités en cas de vente en marché cible négatif et hors marché cible


S’il est vrai qu’un fichier EMT incorrect ou incomplet augmente le risque d’une mauvaise commercialisation, force est de constater que celle-ci peut se traduire de facto par une vente en dehors du marché cible. L’analyse se concentrera donc sur les ventes en marché cible négatif et hors marché cible[79] qui font l’objet d’un avertissement auprès du client final et d’un reporting spécifique auprès du producteur.


Selon l’ESMA, ces ventes ne sont pas proscrites per se mais elles doivent demeurer rares et il est demandé au distributeur de les documenter voire d’en justifier la raison en la mentionnant, le cas échéant, dans la déclaration d’adéquation. En effet, en ce qui concerne les ventes en dehors du marché cible, l’ESMA ne les interdit pas sous réserve de respecter toutes les autres exigences. Il en est de même pour les ventes au sein du marché cible négatif à ceci près que le régulateur considère qu’elles doivent être davantage documentées que la simple justification d’une vente hors marché cible.


Ainsi, le principe cardinal est celui d’une information préalable auprès du client final : le distributeur doit indiquer à ce dernier si la vente intervient au sein du marché négatif ou si la vente est réalisée en dehors du marché cible. Cette information doit être formalisée et transmise au client. 


A défaut, la responsabilité du distributeur pourra être engagée sur le fondement de l’obligation de fournir une obligation claire, exacte et non trompeuse[80]. A l’appui de ce même fondement, repose un devoir d’avertissement implicite[81] pesant sur le distributeur lorsqu’il distribue un produit au sein du marché cible négatif ou hors marché cible.


Au sein de son contrôle SPOT du mois d’octobre 2021, l’AMF a été amenée à se prononcer sur la forme que peut revêtir cet avertissement et si celui-ci doit être bloquant ou non. Selon l’AMF, un distributeur qui adresse aux clients concernés « un message d’avertissement si l’un des critères gouvernance produits du client appartient au marché cible négatif de la valeur, constitue une bonne pratique »[82] sans que celui-ci n’empêche l’investisseur de souscrire au produit. En pratique, ces avertissements sont générés automatiquement par des outils dynamiques paramétrés par le distributeur qui permettent de déceler si la vente est en marché cible positif, négatif ou hors marché cible.


Hormis les ventes en marché cible positif, les autres doivent être justifiées par l’un des deux motifs suivants : à des fins de diversification du portefeuille[83] ou de couverture[84]. L’ESMA rappelle que même si elles sont réalisées à des fins de diversification, ces ventes doivent rester rares[85].


Toutefois, le distributeur n’est pas tenu de signaler au producteur les ventes réalisées en dehors du marché cible dès lors que ces ventes sont réalisées à des fins de diversification et/ou de couverture si elles sont, néanmoins, adéquates compte tenu du portefeuille total du client ou du risque couvert[86].


Autrement dit, la responsabilité du reporting des ventes pèse sur le distributeur pour toutes les ventes en marché cible négatif et hors marché cible uniquement lorsqu’elles ne sont pas justifiées par des motifs de diversification ou de couverture. Le distributeur est tenu de remonter ces dernières au producteur du produit. Quant au producteur, tout comme le distributeur, il doit assurer le suivi et le réexamen régulier des marchés cibles définis. Pour ce faire, le producteur pourra s’appuyer sur les reporting de vente transmis par le distributeur.


Le reporting des ventes en marché cible négatif et hors marché cible non justifiées peut être réalisé de plusieurs manières et il n’existe aucun formalisme obligatoire. Le distributeur peut envoyer directement au producteur lesdites ventes dès leur réalisation sous un format contractuellement convenu (email, courrier, flux automatique etc). Le producteur peut également avoir un rôle pro-actif en adressant annuellement par email un questionnaire de ces ventes sous forme de tableau dans un fichier excel à son réseau de distributeurs. 


Enfin, si le distributeur a recours à une plateforme, celle-ci se chargera de collecter et compiler l’information pour le distributeur qui n’aura plus qu’à l’envoyer au producteur. Par exemple, la plateforme Harvest détecte automatiquement ces ventes grâce à son questionnaire client mis à la disposition des distributeurs et envoie le reporting par flux automatique au distributeur à qui il revient de transmettre, après ses propres vérifications, au producteur.  

*Source : AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021.

 

D.           Le cas des EMT des fonds H2O


A l’été 2020, une société de gestion britannique bien connue de la Place de Paris a attiré l’attention du régulateur français pour un fonds français sous gestion[87]. Cette société de gestion, producteur de fichiers EMT, est la société H2O Asset Management LLP. Cette filiale du groupe Natixis a réalisé des investissements sous-jacents pour ses fonds qui ont mis en lumière à la fois une gestion hasardeuse mais surtout une gouvernance produits déconnectée du marché cible réel de ses produits.


Sans revenir sur le détail de cette affaire qui alimente régulièrement l’actualité jusqu’à aujourd’hui, il est néanmoins utile de rappeler les déboires des fonds H2O dans ses grandes lignes pour mieux appréhender les dysfonctionnements et les erreurs, involontaires ou délibérées, de sa gouvernance produits au sein des fichiers EMT de certains de ses fonds.

Cette société de gestion, créée en 2010, affichait des performances annuelles conséquentes et offrait une rentabilité minimale de plus de 15% par an. Officiellement, ses fonds investissaient principalement dans des produits obligataires et des devises, notamment par le biais d’instruments dérivés, en ayant recours à l’endettement pour maximiser l’effet de levier. Jusqu’en 2019, ses fonds bénéficiaient d’une notation élogieuse de la part des instituts de notation de fonds.


L’affaire commence en juin 2019 lorsque le Financial Times révèle que des fonds H2O investissent dans des titres de dettes illiquides liés au financier allemand controversé Lars Windhorst[88]. À la suite de la publication de cet article, Morningstar suspend la notation d’un des fonds ce qui engendre une vague importante de rachats et un effet mimétique[89]. Pour limiter l’ampleur des pertes, la société H2O a appliqué des décotes pour les rachats sortants durant cette période jusqu’à l’été 2020.


Le 28 aout 2020, à la demande de l’AMF, la société H2O a suspendu, initialement pour quatre semaines, les souscriptions et les rachats de parts de trois de ses fonds (Allegro, Multibonds et Multistratégies) « pour des raisons d’incertitudes de valorisation liées à leurs expositions significatives en titre privés »[90]. La société de gestion étendra ce gel à cinq fonds supplémentaires (Adagio, Moderato, MultiEquities, Vivace et Deep Value) qui détiennent les mêmes sous-jacents que les trois autres. La société s’est engagée à transférer une partie des actifs des fonds concernés dans de nouveaux fonds agréés par le régulateur.


En octobre 2020, la société s’est exécutée en transférant les placements illiquides de ses fonds dans de nouveaux supports de cantonnement[91], appelés « side pockets » dont les opérations demeurent gelés à l’exception de rares fenêtres de sortie. En 2021, la valeur de ces fonds a chuté de 25 à 45% en moyenne ce qui laisse à penser que lorsqu’il sera possible de procéder à leurs rachats totaux, les parts des fonds side pockets seront à vil prix[92]


Avec le recul, il est intéressant de s’arrêter sur la gouvernance produits des fonds concernés. Les champs du marché cible du fichier EMT (brut) des fonds concernés sont résumés ci-dessous :

  

À première vue, tous les fonds H2O concernés par les problèmes d’illiquidité des sous-jacents sont ouverts à tous les types d’investisseurs dont les clients non-professionnels au sens de la réglementation bien qu’il n’y ait aucun capital garanti, un risque de perte totale en capital et pour le fonds Multi stratégies un profil de risque défini à 7, c’est-à-dire le plus élevé.


Ce marché cible défini par le producteur, la société H2O, interroge quant à sa pertinence et son effectivité. En effet, les témoignages publics des investisseurs finaux se sont multipliés depuis que l’affaire a commencé et sont devenues de plus en plus critiques vis-à-vis du marché cible avec les reports de fenêtre de rachat. 


Ces témoignages mettent également en lumière la composition de la clientèle des fonds concernés. Sur les dix milliards d’euros d’encours de ces fonds au jour de la médiatisation de l’affaire, les investisseurs français représentaient environ 40% et étaient majoritairement logés en unités de comptes dans des contrats d’assurance-vie. Ainsi, les investisseurs étaient principalement des petits épargnants et ayant peu de connaissance et d’expérience dans ce type de produits, attirés par les rendements des exercices précédents et rassurés par le support de l’assurance-vie. Dans un article du journal Le Monde, le désarroi et le profil des investisseurs questionnent sur la gouvernance de ces produits : une « (…) enseignante à la retraite a investi 5700 euros dans des fonds H20, également à travers une assurance-vie proposée par un conseiller en gestion de patrimoine. ‘Aujourd’hui, j’ai 1400 euros dehors, gelés dans des side pockets (…). Or, je ne sais pas comment suivre ça, je n’y connais rien, je suis plutôt une littéraire. Je voulais bien prendre un peu de risques, mais pas tant que ça’ »[93].


Plus qu’un mauvais calibrage de ses fichiers EMT, le cas des fonds H20 est un « cas d’école », pour reprendre l’expression de Robert Ophèle interrogé sur cette affaire par la Commission des finances du Sénat en mars 2021, sur la protection des investisseurs dans la gouvernance produits et, en particulier, lorsqu’il y a un risque d’illiquidité du sous-jacent[94]. Cette affaire rassemble à la fois des problèmes de valorisation d’actif (« valorisation indicative »), de détermination du marché cible réel, de calibrage du fichier EMT de la gamme des fonds, d’effet mimétique dans les demandes de rachat et de complexité des supports d’investissement avec une couche de difficulté supplémentaire lorsque le produit est logé dans des UC d’assurance-vie.


Au cours de son audition, Robert Ophèle a plaidé pour une meilleure protection des investisseurs dans ce type de configuration en émettant l’idée d’un lead supervisor qui reposerait sur le seul régulateur de la société de gestion qui aurait les pleins pouvoirs pour prendre les décisions appropriées : de l’immatriculation à la commercialisation des fonds voire la suspension de la commercialisation.


Le renforcement de la protection des investisseurs ne pourra se faire que par une meilleure adaptation du marché cible aux produits et des produits aux marchés cibles. La pratique consistant à mettre un marché cible le plus large possible, ouvert à tous types d’investisseurs, malgré la complexité de compréhension des produits et les risques associés durant la vie des fonds ne peut pérenniser sans que ce type d’affaire ne se multiplie. Les protections mises en place par MiFiD consistant à faire peser sur les distributeurs une obligation de vérification du marché cible ont montré, ici, toutes ses limites pour des ventes qui étaient en marché cible positif…


On rappellera d’une part, que la société H2O et ses dirigeants ont été sévèrement sanctionné par l’AMF notamment par une amende record de 93 millions d’euros pour la première et d’autre part, que depuis aout 2020 les fonds concernés ne sont toujours pas accessibles, H2O n’ayant remboursé que 144 millions d’euros selon une association de petits porteurs[95].


  

Conclusion


La mise en œuvre des obligations liées à la gouvernance produits et notamment les contraintes liées à l’échange d’informations standardisées sur les produits entre les producteurs et les distributeurs via les fichiers EMT représente un défi et un enjeu majeur transversal. 


En effet, il s’agit d’un défi à la fois juridique, organisationnelle, informatique, technique, commercial et financier tant pour les producteurs que pour les distributeurs. Les obligations de gouvernance produits représentent également des enjeux commerciaux déterminants dès lors que ces règles encadrent à la fois la production, la transmission des données et la distribution des produits.


Force est de constater que peu de règlementation n’ont nécessité autant de ressources différentes pour leur mise en œuvre. L’intervention des nouvelles technologies dans la gouvernance produits n’est pas simplement un corolaire nécessaire mais elle constitue un outil indispensable pour se conformer aux attentes réglementaires.


Malgré la hauteur des ambitions fixées et les atermoiements du début dans un marché de plus en plus atomisé en Europe, le bilan de l’EMT est indéniablement positif cinq ans plus tard.


Le standard EMT est un franc succès dès sa mise en place alors même que ce dernier n’ait pas été rendu obligatoire par la réglementation. En effet, les collectes EMT n’ont jamais été aussi importantes dans leur volumétrie. 


Ce succès s’explique, premièrement, par le besoin auquel il répond, celui de faciliter la transmission et la collecte des données produits sous forme standardisées. 


Deuxièmement, ce succès s’explique par la flexibilité de ce format à double titre : son contenu et ses versions. La nature des données pouvant être renseignées au sein de l’EMT sont multiples et laissent le choix au producteur de manière non impérative. Par ailleurs, le format EMT est un format sans cesse mouvant puisqu’il y a de nouvelles versions à chaque évolution réglementaire et/ou consultation de Place pour le rendre le plus précis et adapté possible au marché ainsi qu’à la réglementation.


Si son succès n’est plus à démontrer, le standard EMT a également l’avantage d’être le format le plus efficient et complet pour retranscrire fidèlement les règles de gouvernance produits qui ont été pensées par les rédacteurs européens de MiFiD II. La résistance des supports alternatifs de transmission des données produits parait bien faible compte tenu des évolutions réglementaires et technologiques d’aujourd’hui. Le besoin d’information et d’analyse des données accentué par la pandémie a également mis en évidence l’absolu nécessité de digitaliser les process et la transmission des données de commercialisation pour être en mesure d’assurer une continuité d’activité même en mode dégradé.


Toutefois, le coût induit par la mise en place de ces mécanismes n’est pas neutre tant pour les producteurs que pour les distributeurs. Les coûts cachés issus de la réglementation pèsent de plus en plus lourd à la fois sur le producteur que sur le distributeur à qui les régulateurs européens demandent de collecter et de transmettre de plus en plus d’informations avant, pendant et après leur conseil. Les distributeurs, qui sont présumés avoir des moyens financiers inférieurs aux producteurs, ont de plus en plus de difficulté à assumer seuls la prise en charge de ce cadre réglementaire sans le recours à des plateformes intermédiaires pour les accompagner dans la mise en œuvre de leurs obligations. Cette difficulté constitue, d’ailleurs, l’une des raisons de la concentration en cours des acteurs du marché de la gestion de patrimoine et la gestion d’actifs en général et le développement des plateformes.


A ces coûts s’ajoutent un manque de clarté et une absence de lignes directrices pratiques pour implémenter les évolutions réglementaires. Le dernier exemple en date est le modèle EET. 


En effet, compte tenu d’un nombre croissant de priorité susceptible de retenir l’attention et le souhait des clients, les distributeurs devront classer les critères par ordre de priorité tout en s’adaptant aux informations détaillées du modèle EET pour vérifier si tel ou tel produit satisfait à tous les critères. 


Or, si l’on prend l’exemple des critères environnementaux, le distributeur devra analyser et répertorier toutes les données liées aux fonds notamment les entreprises dans lesquels les fonds ont investi. L’analyse se complique encore davantage pour les fonds de fonds. Toutes ces données figurent dans la v.1 de l’EET bien qu’un grand nombre de données sur ce type de fonds ne devraient pas être disponibles avant plusieurs années.


En mars 2022, la plateforme FinDatEx a publié un première modèle (v.1) de l’EET après une

période de consultation[96]. Le modèle v.1 EET contient, à date, 580 champs et précise dès l’introduction que le statut obligatoire et optionnel des champs changera au fil du temps parallèlement à la mise en place progressive de la réglementation. Le distributeur devra donc lire le fichier EET conjointement avec le fichier EMT lorsque le produit intègre des critères de durabilité.


De même que pour les différentes versions de l’EMT, des mises à jour régulières des versions de l’EET sont déjà lancées puisqu’une v.1.1, v.1.1.1 et v.1.1.2 de l’EET ont été émises dont la dernière version remplacera au fur et à mesure la version précédente.


Selon les réglementations actuelles, au premier rang desquelles PRIIPs est devenu incontournable pour les acteurs de la chaine de distribution, néanmoins, le format EPT issu de la réglementation PRIIPs doit être complété pour être totalement conforme avec la gouvernance produits via la dernière version du format EMT. Comme l’EET et l’EMT, il y aura ainsi les mêmes travers pour l’EPT dont on n’est « qu’à » la seconde version (v2.1).


La complexité liée à la gouvernance produits et à sa matérialisation concrète par le biais de flux de données n’en est qu’à ses débuts…


  

Annexe

  

* Ces données ne se limitent qu’aux instruments financiers de type « fonds » (ou OPC)

[1] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021.

[2] Articles L. 533-24-1 et suivants.

[3] Articles 313-19 et suivants.

[4] Considérant 18, MiFiD II.

[5] L’objectif de la gouvernance des produits est précisément d’identifier toutes les typologies d’investisseurs dont les besoins et caractéristiques sont compatibles avec l’instrument financier émis/commercialisé.

[6] Les établissements doivent, au préalable, réaliser une catégorisation de leurs clients à l’entrée en relation et mettre celle-ci régulièrement à jour.

[7] Les règles de la gouvernance des produits concernent tous les instruments financiers quel que soit leur niveau de complexité, leur niveau de liquidité ou le lieu de leur négociation.

[8] Service d’investissement au sens de MiF II.

[9] Considérant 15 de la directive délégué MiFiD II : « (…) les entreprises d’investissement qui créent, développement, émettent et/ou conçoivent des instruments financiers, y compris lorsqu’elles conseillent des entreprises émettrices sur le lancement de nouveaux instruments financiers, devraient être considérées comme des producteurs, tandis que les entreprises d’investissement qui offrent ou vendent des instruments financiers et des services financiers à des clients devraient être considérées comme des distributeurs ».

[10] M. Storck, « Les relations entre producteurs et commercialisateurs d’instruments financiers : bis repetita placent », RTD Com. 2020, p. 137.

[11] Les mentions obligatoires de la convention étaient définis par les anciens articles L. 533-13-1 et L. 541-9 du code monétaire et financier.

[12] Ordonnance n°2008-1271 du 5 décembre 2008.

[13] Voir supra.

[14] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021.

[15] Tout particulièrement en ce qui concerne la transmission des données relatives au marché cible et aux couts/frais des instruments financiers.

[16] Sigma Partners, Distribution de fonds B2B & enjeux de la donnée, octobre 2021.

[17] Voir supra.

[18] Article

9.1, point 6, MiFiD II.

[19] ESMA, Orientation sur les exigences en matière de gouvernance des produits au titre de la directive MiFiD II n° ESMA35-43-620, III, 6, p. 4.

[20] Points 60 à 63 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[21] Article L. 533-24-1 du Code monétaire et financier.

[22] Article

10.1, point 11, MiFiD II.

[23] Voir supra.

[24] Depuis le 1er janvier 2022, le courtier doit obligatoirement proposer au moins un fonds solidaire, un fonds labellisé ISR et un fonds labellisé Greenfin pour l’ouverture d’un nouveau contrat multi-supports. Ces fonds permettent de soutenir des entreprises engagées sur les plans sociaux et environnementaux.

[25] Article R. 332-5 du Code des assurances.

[26] Voir Recommandation ACPR 2023-R-01 du 17 juillet 2023 sur la mise en œuvre de certaines dispositions issues de la Directive (UE) 2016/97 sur la distribution des produits d’assurance (applicable au 1er janvier 2024).

[27] Autrement appelé Entreprise de Services Numérique (« ESN »), anciennement dénommée Société de Services en Ingénierie Informatique (« SS2I »). L’intégrateur de données est celui qui va intégrer les données des fichiers EMT du producteur au sein de la plateforme de distribution mais également les données transactionnelles après que le client ait acheté ou vendu le produit financier.

[28] Voir supra.

[29] Considérant 18 de la directive délégué MiFiD II.

[30] Ibid.

[31] Orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[32] Ibid.

[33] L’article 16 de la Directive MiF II confirme explicitement cette analyse en énonçant que « les politiques, processus et dispositifs visés au présent paragraphe sont sans préjudice de toutes les autres prescriptions prévues par la présente directive et par le règlement (UE) no 600/2014, y compris à celles applicables à la publication, à l’adéquation ou au caractère approprié ». 

[34] Point 33 des orientations de l’ESMA n°35-43-620 : « L’obligation du distributeur de définir le marché cible réel et de veiller à ce que le produit soit distribué conformément au marché cible réel n’est pas remplacée par une évaluation de l’adéquation ou du caractère approprié et cette obligation doit être respectée en plus d’une telle évaluation et préalablement à celle-ci (…) ».

[35] Article 10, paragraphe 1, de la directive déléguée MiFiD II.

[36] Ibid.

[37] Point 36 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[38] Le distributeur peut soit décider de définir explicitement un marché cible négatif circonscrit, soit opter pour la définition d’un marché cible négatif par défaut. Dans ce dernier cas, le marché cible négatif est constitué de tout ce qui n’est pas le marché cible positif.

[39] Point 72 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[40] Reporting obligatoire si la vente n’est pas justifiée par un motif de diversification ou couverture (voir supra).

[41] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021.

[42] Article 313-20 du RG AMF.

[43] Article 313-19 du RG AMF.

[44] Article 313-25 du RG AMF.

[45] Articles 313-20, 313-23 et 313-25 du RG AMF.

[46] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021.

[47] Voir supra.

[48] Articles L. 533-24-1 du Code monétaire et financier, 313-18, 313-18 et 313-22 du RG AMF.

[49] Articles L. 533-24-1 du Code monétaire et financier et 313-22 du RG AMF.

[50] Points 36 ; 38 et 49 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[51] La méthode du scoring client est une technique consistant à affecter un score à chaque client sur la base des critères de marché cible par rapport à son profil client. Le résultat de ce scoring permet de déterminer si la vente du produit sera en marché cible positif, négatif ou hors marché cible pour un client donné. Les règles de scoring sont propres à chaque distributeur et dépendent du marché cible défini ainsi que de la qualité/quantité de données client recueillies. Par conséquent, une formule générique ne peut être fournie à titre indicatif.

[52] Voir supra.

[53] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021, p. 17.

[54] Points 36, 37 et 38 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[55] Point 38 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[56] Voir infra.

[57] Voir supra.

[58] Voir supra.

[59] Article 16, point 3, de la Directive MiF II.

[60] https://findatex.eu/

[61] FinDatEx se compose de la Fédération bancaire européenne (EBF), de l’Association Européenne de l’Industrie de la gestion la Gestion d’Actifs (EFAMA), d’Insurance Europe, du European Savings and Retail Banking Group (ESBG), de l’Association Européenne des Banques Coopératives (EACB) et de l’Association Européenne des Produits d’Investissement Structurés (EUSIPA). Elle est également ouverte aux autres associations européennes qui souhaitent intégrer la structure.

[62] Les RTS sont des normes techniques de réglementation du règlement européen SFDR.

[63] Les nouveaux champs prennent en compte la classification des fonds en vertu du règlement Disclosure (ou « Sustainable Finance Disclosure Regulation » pour SFDR). 

Voir sur ce point : V. Mercier, « La transparence renforcée des acteurs des marchés financiers en matière de durabilité », Bull. Joly Bourse, n°119s4, mars 2021, p. 53.

[64] Règlement délégué 2021/1253 du 21 avril 2021 modifiant le règlement délégué 2017/565 en ce qui concerne l’intégration des facteurs de durabilité et des risques et préférences en matière de durabilité dans certaines exigences organisationnelles et conditions d’exercice applicables aux entreprises d’investissement.

[65] Règlement délégué 2021/1257 du 21 avril 2021 modifiant les règlements délégués 2017/2358 et 2017/2359 en ce qui concerne l’intégration des facteurs de durabilité, des risques en matière de durabilité et des préférences en matière de durabilité dans les exigences de surveillance et de gouvernance des produits applicables aux entreprises d’assurance et aux distributeurs de produits d’assurance, et dans les règles de conduite et les règles régissant le conseil en investissement applicables aux produits d’investissement fondés sur l’assurance.

[66] Voir supra.

[67] Voir supra, Annexe 1.

[68] Voir infra.

[69] Voir supra.

[70] https://www.quantalys.com/Fonds/Investir/732409

[71] La matrice serait donc la suivante : IF(01010_Investor_Type_Retail=Y;01020_Investor_Type_Professionnal='N';IF(01010_Investor_Type_Retail=Y;01030_Investor_Type_Eligible_Counterparty='N'))

[72] L. 533-24-1 du Code monétaire et financier et 313-19 du RG AMF.

[73] Article 313-18 du RG AMF.

[74] Point 49 des orientations de l’ESMA n°35-43-620 et rappelé par l’AMF dans la synthèse de son contrôle SPOT d’octobre 2021.

[75] Théoriquement, en cas de survenance d’une situation dans laquelle le distributeur estime qu’un produit correspond à un marché cible différent de celui du producteur, il devra prendre attache auprès du producteur afin d’évaluer si la définition du marché cible du producteur est toujours adaptée.

[76] Voir infra.

[77] Article 313-19 RG AMF.

[78] Article

10.5 de la Directive délégué MiFiD II.

[79] Pour rappel, la vente hors marché cible (ou « zone grise ») désigne la zone située entre le marché cible positif et le marché cible négatif.

[80] Article 315-12 RG AMF.

[81] Ce devoir d’avertissement n’existe pas en ces termes dans la réglementation mais se déduit des textes et des écritures de l’AMF notamment dans la synthèse de son contrôle SPOT du mois d’octobre 2021.

[82] AMF, Synthèse des contrôles SPOT sur la gouvernance des instruments financiers, octobre 2021, p. 26.

[83] La diversification vise à permettre qu’une partie des transactions réalisées pour le compte du client ou des produits qui lui seront vendues ou une partie du portefeuille du client puissent s’écarter de son profil déterminé à priori. Cette diversification protège ainsi l’investisseur en termes de risques, de performance et d’exposition.

[84] La couverture est entendue comme visant à réduire ou annihiler le risque pris sur une position.

[85] Point 55 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[86] Point 54 des orientations de l’ESMA n°35-43-620.

[87] https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/communiques/communiques-de-lamf/lamf-confirme-avoir-demande-la-suspension-des-souscriptions-et-des-rachats-des-parts-de-trois-opcvm

[88] R. Smith and C. O’Murchu, « H2O Asset Management : illiquid love », Financial Times, 18 June 2019 : l’article relève que ces fonds qui investissent dans des actifs illiquides sont largement vendus aux épargnants particuliers français qui doivent, pourtant, pouvoir en sortir librement, à tout moment, par leur faculté de rachat. Le quotidien a analysé tous les rapports de gestion de 6 fonds (Adagio, Allegro, Moderato, MultiBonds, Multistratégies et Vivace) et a fait état d’investissements très importants dans des obligations privées non cotées néerlandaises liées à Lars Windhorst. Le Financial Times indique également qu’un conflit d’intérêt pourrait exister entre la société de gestion et ce dernier dans la mesure où le Directeur Général de la société de gestion a été nommé au conseil d’administration de la holding d’investissement de Lars Windhorst.

[89] Morningstar a justifié cette suspension en déclarant quelques jours plus tard que « la concentration des placements sur une série de sociétés liées au même individu est une source d’inquiétude ».

[90] https://www.h2o-am.com/fr/suspension-temporaire-de-fonds-h2o/

[91] On parle, ici, d’opération de cantonnement qui consiste à dupliquer dans d’autres fonds (« side pockets ») les actifs illiquides afin de les isoler et d’autoriser les rachats de parts liquides.

[92] Estimé à 1,6 milliard d’euros lors du cantonnement, l’encours de ces fonds se situe aujourd’hui sous la barre du milliard d’euros.

[93]

https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/01/20/finance-pris-dans-le-scandale-h2o-filiale-de-natixis-les-epargnants-se-rebiffent_6110209_3234.html

[94]

https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/prises-de-parole/discours-audition-de-robert-ophele-president-de-lamf-par-la-commission-des-finances-du-senat

[95] https://www.challenges.fr/finance-et-marche/le-fonds-h2o-natixis-toujours-redevable-d-une-amende-record-de-93-millions-d-euros_863943

[96] Voir infra.

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