Auditionnée par la mission d’évaluation de la loi dite « Sapin 2 », la Maison des Lanceurs d’Alerte a souligné les lacunes du régime actuel de protection des lanceurs d’alerte et appelé à des dispositions plus ambitieuses.
Le 16 décembre 2020, la commission des Lois de l’Assemblée nationale a confié à M. Raphaël Gauvain (LaREM, Saône-et-Loire) et à M. Olivier Marleix (LR, Eure-et-Loir) une mission d’évaluation de la loi dite « Sapin 2 » relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Cette loi prévoit des dispositions, en vigueur aujourd’hui, en matière de protection des lanceurs d’alerte.
Auditionnée ce 17 février 2021, la Maison des Lanceurs d’Alerte a souligné l’importance d’un apport majeur de cette loi qu’est la définition très large qu’elle donne de la notion de « lanceur d’alerte », « une des plus larges au monde et qui permet de protéger toute personne physique lançant une alerte d’intérêt général » ont précisé Antoine Deltour, administrateur, lui-même lanceur d’alerte dans l’affaire des LuxLeaks, et Jean-Philippe Foegle et Juliette Alibert, juristes à la Maison des Lanceurs d’Alerte.
Ils ont néanmoins rappelé les faiblesses manifestes de cette loi, et notamment la rigidité du système des « paliers » qui oblige le lanceur d’alerte à saisir son employeur en premier lieu. Ils ont exprimé la nécessité de revenir sur la notion d’ agir « de manière désintéressée » qui, parce qu’elle reste floue et sujette à controverses, est une source d’insécurité pour les lanceurs d’alerte. Ils ont exprimé le besoin de permettre aux lanceurs d’alerte d’échapper aux poursuites pour vol d’informations lorsque l’acquisition de ces informations est nécessaire pour lancer l’alerte.
Enfin, ils ont souligné la nécessité de ne pas exclure de manière générale et absolue les secrets du régime de protection, pour permettre, dans certains cas, à des lanceurs d’alerte de lancer l’alerte sur des informations couvertes par le secret de la défense nationale, ou le secret de l’avocat, tout en étant protégés.
S’agissant du rôle dévolu au Défenseur des droits, la Maison des Lanceurs d’Alerte a plaidé en faveur d’une consolidation des missions de ce dernier, doublé d’un renforcement des moyens financiers et humains dédiés à sa mission. « Le Défenseur des droits doit notamment être chargé d’un rôle de suivi du traitement des alertes qui n’est actuellement assuré par aucune autorité » ont avancé Antoine Deltour, Jean-Philippe Foegle et Juliette Alibert.
Ils ont en outre relevé des manquements plus généraux auxquels la loi Sapin 2 n’a, à ce jour, pas répondu telle que la mise en place d’un fonds de soutien financier ou la nécessité de contrer le développement des procédures dites « bâillon » en mettant en place une procédure d’urgence permettant de rejeter les poursuites manifestement abusives.
L’audition a été réalisée à huis clos afin de permettre à deux lanceurs d’alerte anonymes de témoigner de manière confidentielle auprès de la commission. Elle a permis de rappeler l’urgence et l’importance de la transposition de la directive européenne sur la protection des lanceurs d’alerte qui doit être l’occasion de doter la France d’une des meilleurs législations au monde en la matière.
p/o Virginie Gastine Menou
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