Rapport sur l’évaluation nationale des risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme en Suisse

Christophe BARDY - GRACES community
30/11/2021
Propulsé par Virginie
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Rapport du groupe interdépartemental de coordination sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (GCBF)

La connaissance des risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme qui pèsent sur un pays constitue un élément central de la stratégie visant à les atténuer. Le Groupe interdépartemental de coordination sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (GCBF) a donc décidé d’évaluer l’évolution qui a caractérisé ces risques depuis la publication en 2015 de la première analyse nationale qui leur était consacrée (rapport NRA 2015).

Le présent rapport est le résultat de cette évaluation. Il présente les tendances de risque de blanchiment entre 2015 et 2019. Il passe en revue les mesures législatives et réglementaires adoptées depuis afin d’améliorer le dispositif helvétique de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Enfin, il identifie les secteurs d’activité ou les types de criminalité pour lesquels les risques se sont modifiés substantiellement ainsi que les nouveaux risques apparus.

Le premier chapitre présente la façon dont les risques ont été estimés dans le rapport NRA 2015 et dans les rapports sectoriels d’analyse des risques publiés depuis. Ces derniers ont en effet permis d’approfondir la connaissance du risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme dans différents domaines (organismes à but non lucratif, personnes morales, crypto-monnaies et crowdfunding, argent liquide, corruption, escroquerie, négoce de matières premières). En résumant ces différentes analyses, le présent rapport permet de comparer l’état du risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme tel qu’il y a été identifié avec celui qui caractérise actuellement la place financière suisse.

Pour réaliser cette comparaison, le deuxième chapitre examine les principales tendances de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme telles qu’elles émergent de l’analyse des communications de soupçons reçues par le MROS, des procédures pénales et des procédures d’entraide judiciaire internationale de la période 2015-2019, et les met en perspective des risques qui avaient été identifiés dans le rapport publié en 2015.

L’analyse, qui se fonde sur les communications de soupçons reçues par le MROS, sur les informations à disposition des autorités de justice, de police et des douanes et sur celles des autorités de surveillance financière, met en évidence quelques évolutions notables : le nombre de communications de soupçons adressées aux MROS a fortement augmenté ; la corruption est devenue l’infraction préalable la plus souvent citée, tandis que l’escroquerie l’est moins que par le passé ; les soupçons de blanchiment d’argent adressés au MROS sans qu’une infraction préalable précise n’ait pu être identifiée ont augmenté ; les relations d’affaires signalées sont plus souvent ouvertes au nom de sociétés de domicile ; les valeurs patrimoniales signalées sont nettement plus importantes et les communications de soupçons émanent, encore plus que par le passé, du secteur bancaire. En croisant les résultats de l’analyse des communications de soupçons avec les sources des autres autorités impliquées dans la lutte contre le blanchiment cependant, le rapport estime que ces évolutions reflètent moins une modification du risque de blanchiment d’argent qui pèse sur la place financière suisse, qu’une évolution du comportement des intermédiaires financiers et spécifiquement des banques, et les effets conjoncturels de plusieurs grandes affaires internationales de blanchiment.

Les années 2015-2019 ont été marquées par l’éclatement de grandes affaires de corruption étrangère (Lava Jato au Brésil, 1MDB en Malaisie, PDVSA au Venezuela), par d’importantes fuites de données financières comme les Panama Papers ou les Paradise Papers, et par plusieurs affaires dites de laundromat, soit des systèmes de déplacements massifs de fonds d’origine peu claire, de pays de l’ex-URSS vers l’Europe occidentale, souvent par l’entremise de banques baltes. Pendant la période sous revue, l’impact de ces trois types d’affaires sur la place financière suisse a été très important. Il explique en grande partie les évolutions statistiques constatées depuis 2015, mais représente un état révolu et non actuel du blanchiment d’argent.

Au-delà de ces variations conjoncturelles dues aux répercussions en Suisse de ces affaires internationales, le risque de blanchiment d’argent n’a que peu évolué de 2015 à aujourd’hui. Au regard des communications de soupçons, des procédures pénales ouvertes pour blanchiment d’argent et des procédures d’entraide judiciaire internationale, la Suisse continue d’être surtout exposée au blanchiment d’argent issu d’infractions préalables commises à l’étranger, ce qui s’explique par sa place financière très internationale. En conséquence, les secteurs d’intermédiation financière les plus vulnérables au blanchiment d’argent restent les banques, les gestionnaires de fortune, les fiduciaires et les avocats et notaires, tandis que parmi les secteurs non financiers, les activités de négoce de matières premières continuent d’être caractérisées par un risque important.

Malgré les variations dans leur hiérarchie, les mêmes infractions préalables principales qu’en 2015 sont signalées actuellement, soit la corruption, l’escroquerie, l’abus de confiance, la gestion déloyale, l’utilisation frauduleuse d’un ordinateur et l’appartenance à une organisation criminelle. Du point de vue des infractions préalables, la seule nouveauté notable est l’apparition du délit fiscal qualifié parmi les principales infractions préalables soupçonnées. Comme ce délit n’est devenu un crime, et par conséquent, une infraction préalable au blanchiment que lorsqu’il a été introduit au code pénal en 2016, l’évolution du risque de blanchiment qui lui est associé ne peut pas être évaluée précisément.

Le troisième chapitre présente les principales mesures adoptées depuis 2015 pour atténuer le risque de blanchiment d’argent. Il offre un résumé des différentes modifications législatives et réglementaires qui, souvent adoptées à la suite des recommandations des rapports d’analyse des risques, contribuent à pallier les lacunes constatées dans le dispositif suisse de lutte antiblanchiment.

Dans le dernier chapitre, le rapport présente les trois domaines où le risque semble avoir évolué depuis 2015 : celui des casinos en ligne, qui ne sont autorisés en Suisse que depuis 2019 ; celui du financement du terrorisme ; et celui des crypto-monnaies, dont le développement rapide et la popularité croissante font émerger des risques nouveaux.

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