La Commission européenne a publié le premier rapport à l'échelle de l'UE sur l'état de droit. Le rapport publié aujourd'hui comprend les contributions de chaque État membre et passe en revue les développements tant positifs que négatifs observés dans l'ensemble de l'UE. Il montre que de nombreux États membres appliquent des normes élevées en matière d'état de droit, mais que des défis de taille doivent encore être relevés dans ce domaine dans l'UE. Il reflète également l'évolution en la matière découlant des mesures d'urgence prises par les États membres en réaction à la crise du coronavirus. Le rapport couvre quatre grands piliers ayant une forte incidence sur l'état de droit: les systèmes de justice nationaux, les cadres de lutte contre la corruption, le pluralisme et la liberté des médias, ainsi que d'autres questions institutionnelles liées à l'équilibre des pouvoirs essentiel à un système efficace de gouvernance démocratique.
L'objectif du nouveau rapport sur l'état de droit est d'élargir la panoplie d'outils dont dispose déjà l'UE au moyen d'un nouvel outil de prévention et de lancer un débat inclusif et une culture de l'état de droit dans l'ensemble de l'UE. Il devrait aider l'ensemble des États membres à examiner les moyens de remédier aux problèmes et de tirer des enseignements de leurs expériences respectives, et mettre en évidence les possibilités de renforcer encore l'état de droit dans le plein respect des systèmes constitutionnels et traditions nationaux.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré: «L'état de droit et nos valeurs communes sont le fondement de nos sociétés. Ils font partie de notre identité commune en tant qu'Européens. L'état de droit protège les citoyens du règne de la loi du plus fort. Si nous avons des normes très élevées en matière d'état de droit dans l'UE, nous avons également plusieurs défis à relever. La Commission européenne continuera de travailler avec les autorités nationales pour trouver des solutions et garantir les droits et libertés des citoyens au quotidien.»
Vera Jourová, vice-présidente chargée des valeurs et de la transparence, a déclaré: «Aujourd'hui, nous comblons une lacune importante de notre panoplie en matière d'état de droit. Le nouveau rapport traite, pour la première fois, tous les États membres sur un pied d'égalité pour identifier les tendances en matière d'état de droit et contribuer à prévenir l'apparition de graves problèmes. Chaque citoyen doit avoir accès à des juges indépendants, bénéficier de médias libres et pluralistes et avoir la certitude que ses droits fondamentaux sont respectés. Ce n'est qu'alors que nous pourrons nous appeler une véritable Union des démocraties.»
Didier Reynders, commissaire chargé de la justice et des consommateurs, a quant à lui déclaré: «Le nouveau rapport sur l'état de droit marque le début d'un dialogue ouvert et régulier avec chaque État membre, lequel nous permet de partager les bonnes pratiques et de prévenir les problèmes avant qu'ils ne se posent réellement. L'objectif est d'instaurer une véritable culture de l'état de droit dans l'ensemble de l'Union européenne et de susciter un véritable débat aux niveaux national et européen.»
Système de justice
Un certain nombre d'États membres entreprennent des réformes visant à renforcer l'indépendance de la justice et réduisent l'influence du pouvoir exécutif ou législatif sur le pouvoir judiciaire. Il s'agit notamment des États membres où l'indépendance de la justice est traditionnellement considérée comme élevée, voire très élevée. Les évaluations par pays montrent que l'indépendance de la justice reste un sujet de préoccupation dans certains États membres, dont quelques-uns ont fait l'objet de procédures d'infraction ou de procédures au titre de l'article 7, paragraphe 1. Veiller à ce que les systèmes de justice soient adaptés à l'ère du numérique constitue également un défi à l'échelle de l'UE et la pandémie actuelle a donné un nouvel élan à l'accélération des réformes numériques nécessaires.
Cadres de lutte contre la corruption
Plusieurs États membres ont adopté des stratégies globales de lutte contre la corruption, tandis que d'autres sont en train d'en élaborer. Une mise en œuvre et un suivi efficaces restent essentiels pour garantir des progrès. De nombreux États membres ont également pris ou prévoient de prendre des mesures pour renforcer leur cadre relatif à la prévention de la corruption et à l'intégrité, et certains ont adopté des mesures visant à renforcer la capacité du système de justice pénale à lutter contre la corruption. Par ailleurs, l'efficacité des enquêtes pénales et de la poursuite et du jugement d'actes de corruption, notamment de corruption à haut niveau, continue de poser problème dans plusieurs États membres.
Liberté et pluralisme des médias
Les citoyens de l'UE bénéficient globalement de normes élevées en matière de liberté et de pluralisme des médias. En particulier pendant la pandémie de coronavirus, les médias ont joué un rôle essentiel dans la lutte contre la désinformation. Le rapport soulève néanmoins des préoccupations, dans certains États membres, quant à l'efficacité et à l'adéquation des ressources, ainsi qu'aux risques de politisation des autorités chargées des médias. Certaines évaluations par pays ont également mis en évidence des cas dans lesquels la pression politique exercée sur les médias a suscité de vives inquiétudes. Enfin, des journalistes et d'autres acteurs des médias sont confrontés à des menaces et à des attaques liées à leur travail dans un certain nombre d'États membres, même si certains pays ont également développé des pratiques et mis en place des structures et des mesures pour soutenir et protéger les journalistes.
Équilibre des pouvoirs entre les institutions
L'équilibre des pouvoirs entre les institutions est au cœur de l'état de droit, faisant en sorte que les pouvoirs exercés par une autorité publique soient soumis à un contrôle démocratique. Dans un certain nombre d'États membres, des réformes constitutionnelles ont été engagées pour renforcer l'équilibre des pouvoirs entre les institutions. De nombreux États membres ont également mis en place des politiques systématiques visant à associer les parties prenantes et à faire en sorte que les réformes structurelles soient le fruit d'un large débat au sein de la société. Dans le même temps, le rapport montre que le recours excessif à la législation accélérée et à la législation d'exception peut susciter des inquiétudes en matière d'état de droit. Dans l'ensemble de l'UE, la société civile reste un acteur essentiel de la défense de l'état de droit et, dans la plupart des États membres, elle bénéficie d'un environnement favorable. Dans certains États membres, toutefois, on a recensé des exemples dans lesquels la société civile était confrontée à de graves difficultés causées par la législation limitant l'accès à des financements étrangers ou par des campagnes de dénigrement.
Mesures d'urgence prises dans le contexte du coronavirus
La pandémie perdure et des régimes et mesures d'urgence sont toujours en place dans un certain nombre d'États membres. Le rapport met en évidence certaines des questions qui sont apparues lors des débats nationaux et dans le cadre de la réponse juridique et politique à la crise. À titre d'exemple, la modification ou la suspension de l'équilibre normal des pouvoirs au niveau national peut poser des problèmes particuliers pour l'état de droit. Parallèlement, plusieurs bons exemples montrent que des décisions de justice nationales ou l'intervention de médiateurs ont eu une incidence positive sur les mesures d'urgence prises. La Commission continuera sa surveillance jusqu'à la suppression progressive des mesures d'urgence.
Le rapport sur l'état de droit alimentera le débat plus large sur l'état de droit aux niveaux européen et national. La Commission se réjouit à la perspective de dialoguer avec le Parlement européen et le Conseil sur les questions relatives à l'état de droit et estime que ce rapport constitue une base solide pour la poursuite des travaux interinstitutionnels.
La Commission invite également les parlements nationaux et les autorités nationales à discuter ce rapport, notamment de ses chapitres par pays, et à s'appuyer les uns sur les autres en signe d'encouragement à poursuivre les réformes et d'acceptation de la solidarité européenne. Les parties prenantes nationales et européennes concernées devraient également être associées.
Sur la base des résultats du dialogue autour de l'édition 2020 et de l'expérience acquise au cours de la première année de fonctionnement du mécanisme européen de protection de l'état de droit, la Commission commencera à élaborer le rapport de 2021, poursuivant le mouvement amorcé pour rendre l'état de droit plus résilient dans nos démocraties.
Contexte
Le premier rapport annuel sur l'état de droit est l'une des principales initiatives du programme de travail de la Commission pour 2020 et fait partie du mécanisme européen complet de protection de l'état de droit annoncé dans les orientations politiques de la présidente von der Leyen. Il est le fruit d'un dialogue étroit avec les autorités nationales et les parties prenantes et couvre tous les États membres sur une base objective et impartiale. L'évaluation qualitative réalisée par la Commission se concentre sur les développements importants intervenus depuis janvier 2019 et garantit une approche cohérente en appliquant la même méthode à tous les États membres, tout en restant proportionnée à ces développements.
Le rapport s'inscrit dans le cadre du nouveau cycle annuel sur l'état de droit – le mécanisme de protection de l'état de droit. Ce mécanisme est un cycle annuel visant à promouvoir l'état de droit et à prévenir l'apparition ou l'aggravation de problèmes. L'objectif est de mettre l'accent sur l'amélioration de la compréhension et de la connaissance des problèmes et des développements importants, ainsi que de recenser les défis liés à l'état de droit et d'aider les États membres à trouver des solutions avec le soutien de la Commission et des autres États membres, ainsi que des parties prenantes, notamment la Commission de Venise.
L'objectif du mécanisme est préventif. Il est distinct des autres éléments de la panoplie de l'UE en matière d'état de droit et ne remplace pas les mécanismes prévus par le traité pour permettre à l'UE de de résoudre des problèmes plus sérieux liés à l'état de droit dans les États membres. Parmi ces outils figurent les procédures d'infraction et la procédure visant à protéger les valeurs fondatrices de l'Union au titre de l'article 7 du traité sur l'Union européenne. Il diffère également de la procédure proposée relative à la conditionnalité budgétaire, dont l'objectif est de protéger le budget de l'Union dans les situations où les intérêts financiers de l'Union pourraient être menacés en raison de défaillances généralisées de l'état de droit dans un État membre.
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